Sinonil faudrait concevoir que la conscience, dans la mesure où elle est un effet, est non consciente (de) soi. Il faudrait que, par quelque côté, elle fût sans être conscience (d') être. Nous tomberions dans cette illusion trop fréquente qui fait de la conscience un demi-inconscient ou une passivité. Mais la conscience est conscience de part en part. Elle ne
Quelques pistes La conscience est proche du savoir. Si elle n’est pas elle même savoir, c’est en son sein que l’on peut départager cette zone claire de la connaissance et celle obscure de l’ignorance. Il est possible d’avoir conscience de son ignorance, mais cette conscience est déjà savoir de ses limites, des limites de sa connaissance. Ce savoir obscure n’est certes pas connaissance scientifique pas d’emblée, mais désir de connaissance. Et il y a déjà dans ce désir le principe des connaissances à venir qui sont déjà anticipée sur le mode du pressentiment. La conscience n’est pas le savoir, mais le point d’entrée dans le savoir ; toute conscience n’est pas savoir, mais tout savoir apparaît comme conscient, à un certain degré de lui même. L’étymologie le dit ce qui se fait avec conscience, se fait avec » science ». Ainsi, il est possible de faire quelque chose sans méthode, de réussir en s’en remettant à la chance, mais cette réussite sera due au hasard et ne saura pas être répétée. Elle n’est véritable réussite, si en plus du résultat s’adjoint ce résultat supplémentaire qu’est la connaissance. Ce savoir n’est pas seulement le savoir de la chose, mais du processus qui a permis de la produire ou du moins de la viser, de la rencontre, de la saisir et de la connaître. La conscience est le présupposé de toute connaissance, et tout connaissance, est la rationalisation de phénomène conscients c’est à dire l’ordonnancement selon les lois de la nature, des représentations que l’on s’en fait. La conscience ne saurait être dès lors illusoire. Elle ne pourrait être à la marge, mais seulement par défaut ce serait parce que l’on serait insuffisamment conscient que nous serions dans l’erreur. Mais en réalité, si l’on devenait pleinement conscient, la part des représentations qui sont admises se réduirait à peau de chagrin, et il ne resterait plus que des certitudes, dont l’apodicticité nous assurait de la science. La conscience absolue est scientifique, et elle est ce qui met à distance l’illusion et l’erreur. La conscience est source de clarté et de connaissance, et non pas d’illusions. * I. A Descartes semble avoir ouvert la voie en ce qui concerne la mise en convergence de la science et de l’illusion. Ainsi, en découvrant la conscience, Descartes rencontre le réel. Quand il cherche cette première certitude, socle sur lequel fondé son nouvel édifice de savoir, il a rencontre cette chose qu’est la conscience en latin, chose se dit res », qui a donné réalité ». La réalité de la conscience, est cette première certitude, cette réalité dont on ne peut pas douter et dont la présence, la facticité se présente avec le caractère d’une évidence telle qu’on ne peut que reconnaître qu’elle existe. La conscience est une chose, et la connaissance de cette chose est assurée par l’évidence à laquelle la conscience se présente. La conscience a conscience d’elle même sans l’ombre d’un doute, et cette absence de doute est le critère de la connaissance. La conscience de soi, est immédiate et par là la conscience se saisit se conçoit, se connaît comme chose pensante. Dès lors, la conscience n’est pas source de l’illusion. Elle est source de pensées on pourrait représenter les pensées effectivement comme un flux elles ne se juxtaposent pas dans l’espace, mais se dispose diachroniquement selon la ligne du temps, mais toutes ces pensées, qui s’écoulent dans le temps qu’ouvre la conscience, sont toutes rapportées au sujet, à l’âme dont l’attribue essentielle est la pensée. L’acte permanent de la pensée est ce par quoi la continuité dans le temps signale la substantialité du sujet. L’âme est substance pensante. Et cela ne saurait être une source d’illusions. B. Pour autant, la conscience est source de toutes les représentations sur le réel. Dès lors, elle est source des représentations justes et des représentations fausses. Aussi si le fait de la conscience, ou même le fait métaphysique de la réalité substantielle de l’âme conçue comme chose pensante ne fait pas doute pour le rationaliste cartésien, il n’empêche que des représentations fausses peuvent être reçue en la créance de l’être conscient de lui même. Tel est le destin de celui qui se fie aux opinions. Or, même Descartes le reconnait dans la première de ses trois maximes de la morale par provision, il n’est pas possible de faire autrement que de céder sur l’exigence de vérification de la science pour répondre aux nécessités de la vie. La vie imposant sans délais de se positionner dans l’existence, il nous faut nous appuyer sur ces jugements précaires que sont les opinions pour nous orienter dans l’existence. Ainsi, la conscience en tant qu’elle n’est pas seulement le point de départ d’une reconstruction solide, selon les canons de la sciences, et de la mathésis universalis, en suivant des chaines déductives à partir de principes assurés, mais aussi le principe de l’action dans un environnement où le possible et le contingent laisse place à la délibération et à une part de latence dans la détermination, la conscience doit avoir à s’y prendre à des illusions qu’elle accepte en elle. Est ce à dire pour autant que la conscience serait source de ces illusions qu’elle prend en sa créance ? Les opinions, sont la plupart du temps, des opinions reçues. Il ne s’agit pas d’illusion produite mais reçue. Les jugements sont des préjugés, des jugements produits par d’autres. Certes il nous revient de nous assurer que ce que nous affirmons est vrai, et non pas prendre pour argent content ce que l’on nous assure être vrai, mais néanmoins il nous faire aussi confiance dans une certaine mesure, dans les témoignages pour des choses qui sont hors de notre portée. Il en va autrement en ce qui concerne le témoignage des sens. En effet, ce dernier est plus intérieur à notre psychiques que les témoignages des autres, et si notre perception était source d’illusion, étant donné qu’elle est part de notre conscience on parle de conscience perceptive alors, on pourrait dire que la conscience est trompeuse. Et il est vrai que dans la première méditation métaphysique, Descartes évoque ce cas des illusions de sens, qui jette le discrédit sur l’ensemble de leur témoignage. S’ils ont pu nous tromper une fois, ils le peuvent sans doute à nouveau. Néanmoins, une puissance en nous semble échapper à cette dérive, et c’est l’entendement le jugement, est ce qui rectifie les données illusoires de sens. Ce n’est pas les sens qui sont trompeurs, c’est le jugement qui est mal ajusté. Dans les réponses aux objections, Descartes donne alors l’exemple du bâton brisé le jugement est ce qui rétablit la réalité de la rectitude du bâton, alors que les sens du fait de la diffraction de la lumière différente en fonction du changement de milieu. Il reste que le jugement n’est pas assuré lui même de ses fondements. On pourrait imaginer une forme de folie intérieure à la conscience qui le soutient. C. C’est cette hypothèse que fait Descartes dans la première méditation. mais quoi ce sont des fous ? » cette phrase qui écarte en apparence la possibilité de la folie, la rétablit en réalité, car Descartes s’adressant à lui même est comme dédoublé. Il y a en effet en lui une tendance à jouer contre lui même il se présente l’hypothèse d’un rêve, d’une illusion totale. Cet argument du rêve, mis en scène par le théâtre l’illusion Comique de Corneille ou le cinéma Inception de Nolan va jusqu’à affirmer la possibilité d’un malin génie, d’un Dieu trompeur. La conscience serait soumise donc à des manipulations et sujette à des illusions. Elle serait comme source d’illusion. Déjà Platon avait soulevé cette possibilité avec son allégorie de la caverne, mais la manipulation était extérieure, et il était toujours loisible au prisonnier sous le coup d’une illusion cinématographique de sortir de la caverne. Là, ce que l’on voit, c’est au contraire c’est que les illusions sont intérieures à la conscience, et que le malin génie est cette instance qui fait percevoir comme vraie car certaine, c’est à dire claires et distinctes donc évidentes des vérités qui ne le sont pas. Ce n’est pas que le témoignage des sens qui est douteux, c’est le témoignage par notre esprit de l’expérience de la vérité qui l’est. Néanmoins Descartes le montre, même si la conscience est source d’illusion, il y a en périphérie de ce monde inquiétant et familier, une certitude absolument indubitable celle de sa propre conscience. Si la conscience est sources d’illusions ne peut-elle pas être s’illusionner sur sa propre nature, et son propre pouvoir ? * II. A. La conscience peut s’illusionner sur la nature extérieure et constant que les limites de son pouvoir de connaître sont plus proches d’elle qu’elle ne le soupçonnait, rentrer dans un moment sceptique. Mais, ce doute peut également, alors rebondir sur elle même, se redoubler en doute de son pouvoir. Peut être que la liberté qui semblait être la conséquence de l’autarcie initiale dont une conscience se saisissant dans son concept est capable, est illusoire. Spinoza est celui qui objecte ainsi à Descartes que le libre arbitre est une illusion, et les neuro sciences semblent lui donner raison dans une certaine mesure. La conscience serait alors non seulement sources d’illusions, mais elle serait en tant qu’entité autonome, et autarcique, entité métaphysique certaine de sa substantialité une illusion. Non seulement ce dont nous nous serions conscience seraient possiblement des illusions nous serions comme dans l’idéalisme de Beckley en présence des seules représentations de la réalité, sans jamais être certain de rencontrer la réalité, mais en plus, la conscience immédiate que nous aurions de nous mêmes seraient une illusion. Ou plutôt il serait une illusion de déduire de cette conscience, une connaissance. Nous nous supposons peut être entité substantielle, mais cette supposition pour nécessaire qu’elle soit pour ordonner nos représentation n’en est pas pour autant une connaissance. Le moi, n’est qu’une pensée qui accompagne les autres pensées. Comme le dit Kant le je pense » accompagne toute mes représentations », mais il faut bien se garder de lui donner une réalité et de prétendre le connaître. B. Sans doute la thèse de Spinoza qui consiste à faire de la conscience une émergence, n’est pas mois réductrice que celle de Descartes qui en fait une chose pensante ». La chose qu’est la conscience serait alors assimilable au cerveau dont la conscience ne serait que l’émergence. La pensée n’est qu’un attribut d’une même substance, le fantôme qui surnage, à travers les enchaînements d’idée qui la traverse en parallèle des relations entre les corps qu’ils reflètent. L’illusion qu’est cette conscience ectoplasmique est expliquée par Spinoza comme étant, l’entretient d’une forme d’ignorance. Pour ce cacher cette vérité dérangeante, la conscience conspire contre elle, et fomente une obscurité qu’elle jette sur les causes réelles de ce qui lui arrive. Elle constate dans le corps dont elle est l’idée des changements dont elle se croit l’origine, alors que les causes lui sont extérieures. Cette ignorance des causes, et l’origine de l’illusion du libre arbitre. Cette illusion est doublement dommageable, car l’erreur se redouble en ignorance de cette erreur. Et cette boucle ferme la possibilité d’une correction possible. Il faut pour être plus libre, être conscience d’être plus déterminé que l’on ne croit l’être. La conscience qui se précipite dans le monde ne comprend pas que ce qui détermine l’action de l’individu qu’elle croit pilotée est extérieur à cet individu. Ce qui lui revient en propre est de commencer à se faire des idées justes sur le monde et donc à commencer à s’éclairer, à se déciller sur les illusions produites par l’imagination. C’est par une métaphore que Spinoza montre la voie les démonstrations sont les yeux de l’esprit ». Il faut ouvrir les yeux de l’esprit, et cesser de se laisser subjuguer par les illusions des sens, qui imprègnent notre esprit à travers cette faculté hybride qu’est l’imagination. La connaissance est donc source d’illusion quand elle ne se soumet pas à la règle logique es enchaînement déductif, par quoi l’ordre des choses s’impose à elle à l’encontre de l’ordre de ses représentations où elle tend à se faire le centre de tout. C. L’illusion commune à Spinoza et à Descartes, est l’illusion chosiste. Elle consiste à passer du plan psychologique et descriptif de la conscience, ou plan ontologique et normatif de la connaissance. La conscience n’est pas une chose ni chose pensante, ni cerveau. Sa découverte est à la fois l’émergence d’une forme de modernité par quoi elle s’affirme comme point d’entrée d’un sujet à partir de quoi le monde se déploie dans son objectivité selon une perspective particulière, et en même temps cette découverte, cette surrection est immédiatement l’objet d’une méprise. La connaissance prétendue de sa nature ontologique bouche la voie de l’exploration du champ qu’elle constitue. C’est l’empirisme d’un Locke, qui, par exemple viendra décrire les associations d’idées, les relations et comment à partir de ces relations s’engendre comme terme supplémentaire la conscience de ces relations dans le champ même que dégage Descartes par l’expérience du cogito. C’est expérience de la conscience, pour illusoire qu’elle soit quant à la perception de ce qui la conditionne matériellement dans l’obscurité de notre organisme ne peut être nié en tant que vécu. Et les représentations telles qu’elles sont vécues, peuvent être décrites avec quelque vérité si l’on se tourne vers elles avec une attention suffisante. La conscience une fois l’illusion chosiste levée, est la ressource d’une enquête sur notre vie de l’esprit. La suspension phénoménologique de la thèse du monde donne alors la marge de manœuvre nécessaire à la description de cette région de l’être par quoi l’être se manifeste. Elle n’est pas source d’illusion, mais le lieu de l’apparaître du vrai. III. A. La raison de l’illusion chosiste n’est peut être pas une raison contingente, une erreur d’inattention. Si la posture phénoménologique, la réduction qu’elle est nécessaire, et à contretemps de l’attitude naturelle et nécessite une conversion du regard, c’est que la faute initiale que cette torsion, cette révolution copernicienne corrige n’est rien moins qu’accidentelle il s’agit au contraire d’une faute qui peut même relevée d’une responsabilité morale, et qui comme le dit Blaise Pascal tient de notre propension à nous faire le centre de tout. Ce qui vient faire écran au réel n’est pas une opinion mal examinée, mais une illusion secrétée par la conscience le moi ». Ce que Pascal désigne par la substantivation d’un adverbe, c’est cette substantialisation du sujet, produit spontanée de l’amour propre. Le moi est tyrannique, car alors même qu’il n’a rien de particulier et d’une méchante banalité puisqu’il ne peut même pas se dire autrement que par ce petit mot de deux lettres que tout le monde a en commun en français je », il s’estime comme étant le roi du monde. Cette absurdité évidente et pourtant, et c’est le plus étrange, une illusion très commune et répandue, à telle point que son énormité passe totalement inaperçue. C’est pour expliquer la possibilité d’un tel paradoxe monstrueux, d’une telle auto hypnose collective que l’auteur des Pensées en appelle à la puissance explicative de l’imagination que Descartes appelle aussi la folle du logis ». Celle-ci est trompeuse, et d’autant plus qu’elle dit parfois la vérité. Elle n’est pas fiable mais extrêmement persuasive elle s’adresse avant tout au sens, et même si la raison la dément, elle continue à faire son effet. L’imagination est la reine du monde dit Pascal, en effet, elle est ce qui régit les rapports entre les hommes, mais également les rapports de soi avec soi. Les êtres humains sont si peu enclins à la vérité quant à leur propre être, et surtout leur existence tourné vers l’inessentiel au lieu de s’intéresser aux questions les plus brulantes d’importance qu’ils ne peuvent accéder à la connaissance de soi qu’à travers le décentrement maximal conversion que leur propose la religion selon Pascal, à travers la reconnaissance et l’imitation de Jésus Christ. L’imagination est source d’illusion et la conscience est tramée d’imaginaire. Cette soi disant conscience de soi, est en réalité une imagination de ce que nous sommes, qui nous généralement une représentation sinon complètement fausse en tout cas tronqué de nous mêmes. Nous nous représentons comme nous voudrions qu’ils nous voient, et nous demandons aux autres comme Oronte dans le Misanthrope qu’ils nous disent être ce que nous voulons paraître. Tout ce théâtre là montre assez bien que le cœur de l’être humain est vanité, et que, comme le dit si bien Shakespeare nous sommes faits de la mêmes étoffes que le songes et notre infime est cernée de brouillard ». La conscience jette de l’illusion sur le monde, afin de mieux se méconnaître. B. Pour autant, l’ignorance dans laquelle nous sommes n’est pas totale, puisque nous pouvons la soupçonner. Et Socrate n’a pas tors de faire déboucher son connais toi toi-même » sur le constat de ses limites la connaissance de son ignorance, puisque c’est le début d’un savoir véritable un savoir qui connaître les limites de son application possible, c’est à dire un savoir critique. Nous ne sommes dans l’illusion non par ignorance absolument, mais par l’ignorance de ce qui limite nos connaissances. Nos connaissances sont partielles, mais elles sont suffisantes pour nous mettre en quête de connaissance véritable, authentique, même si celles ci sont paradoxales toutes les vérités ne peuvent obtenir le même degré de clarté que les vérités mathématiques, c’est là une limite au platonisme. Il convient donc de chercher, même si l’on n’est pas sur de trouver. La conscience se découvre par là, à la fois avoir une texture inattendu non seulement, ce n’est plus une chose tendanciellement solide, ou en tout cas identifiable comme occupant une place donnée mais un flux, un être temporel qui s’écoule dans le temps ; mais en plus, cette conscience fluente, tramée d’illusion, mais de la même texture que le temps dont elle explore le paradoxe d’une évidence réticente à être dite, a quelque chose d’un fonctionnement à la dépense. Plus elle se déploie dans la domaine de la quête de l’absolu qui viendrait compléter la misère que la connaissance de soi révèle l’absence de fond, de fondement, plus elle découvre de ressource. La conscience apparaît alors comme la ressource d’un désir infini de vérité, si bien que quelque chose de cette vérité se révèle au cœur de ce désir. C. Il y a dans l’expérience de la littérature, un tel paradoxe à l’œuvre certaines grandes œuvres ont justement cette propriété étrange de s’enrichir à chaque fois que l’on vient y puiser, et finalement de se révéler inépuisable. Ainsi, l’usage ne les use pas, mais les enrichit. Ainsi, la recherche du temps perdu est à la fois un exemple de ce type qu’une communauté de lecteurs fidèles chérissent, mais aussi la théorisation d’un tel fonctionnement dans la manière dont Marcel devient Proust, à travers la découverte de l’épaisseur d’une temporalité qui double l’éternel présent d’une vie mondaine frivole. De la même manière la conscience, est s’il faut la voir comme un courant de pensée, un élixir de jeunesse par lequel l’individu rajeunit quand le corps d’un individu suit la pente inéluctable du devenir des choses matérielles c’est à dire la corruption. La conscience s’intensifie, se vivifie, et voit de plus en plus clairement des choses qui dans la dispersion de la jeunesse apparaissaient comme confuse. Ramasser en elle même, elle revient à une certaine intensité et clarté qui illumine ceux qui avec une pauvreté de moyens se laissent éclairer par elle. * * * Elève 2 La conscience apparaît avec le vivant. On pourrait reconstituer ce concept chez Aristote à travers la notion d’âme. Il distingue trois types d’âme végétative, sensitive et noétique. L’âme et par là la conscience serait liée à la question du mouvement ; la conscience serait la conscience d’un mouvement et par là même d’un écart avec un repos quelque chose qui reste identique à soi. La conscience est par soi-même mouvement, écart avec soi même, extase par quoi elle se tourne vers l’autre que soi l’en soi est la nourriture du pour soi » de la conscience dans la phénoménologie. Cette conscience mouvante, et ce pour quoi il y a du mouvement, et par là même aussi de la durée. La perception du temps et des écarts entre temporalités différentes est ce qui rend nécessaire la conscience. Ces différentes types de conscience, sont hiérarchiquement classées chez Aristote la conscience la plus haute est la conscience noétique, car c’est le pensée du devenir en général. La pensée de ce qui meut toute chose, mais qui ne se meut pas le premier moteur est accessible par intermittence à la pensée noétique. La phénoménologie, en héritière de l’aristotélisme, suspend la réalité du monde pour la faire se refléter dans le champ de la conscience transcendantale. Elle pense l’a priori corrélationnel, c’est à dire les condition d’apparition des choses, des phénomènes qui disparaissent au moment où les phénomènes apparaissent eux mêmes. C’est cette conscience noétique, qui analyse le corrélat noético-noématique de tout apparaître pour qui il y a du sens du monde, et qui apparaît capable de déjouer les préjugés de l’attitude naturelle, c’est à dire les illusions. Pour les autres types de conscience, si la part d’illusion est plus grande que la part de vérité, c’est qu’elle a une fonction vitale, et qu’elle est nécessaire à la vie. Est ce que la conscience est spontanément source d’illusions, à quoi seule la conversion du regard phénoménologique fait exception ou au contraire, il y au delà des illusions une part de vérité irréductibles à quoi la phénoménologie ne fait que retourner, en rendant la conscience réflexive par sa méthode de réduction ? En phénoménologie, il est nécessaire de distinguer l’apparence du phénomène. Le phénomène est ce qui apparaît, mais n’est pas forcément une apparence. Le phénomène, c’est la chose telle qu’elle nous apparaît. La chose n’est jamais dissociée de son mode d’apparaître ; c’est là l’apport de la phénoménologie. La science elle-même, qui prétend décrire le monde tel qu’en lui même, qui l’objective, et qui le décrit indépendamment du point d’observateur que l’on a construit sur lui, est le prolongement de l’attitude naturelle, en soi naïve. La science a des présupposés, qu’elle n’interroge pas et dont elle se soutient. Il ne s’agit pas avec le sceptique de critiquer la science, et de la découvrir non objective. Au contraire, c’est son objectivité qui la rend nécessairement doublée de présupposés ininterrogés. La phénoménologie interroge les conditions de l’apparaître des choses, que n’interroge pas la science et qui en cela recouvre le champ de la conscience, le masque par l’attitude objectivante de la science. L’illusion n’est donc pas du côté de celui qui réaffirme la nécessité de décrire le vécu de la conscience, mais du côté de celui qui croit pouvoir sauter au dessus de son ombre et décrire les choses telles qu’en elles-mêmes, sans jamais préjuger de ce qu’elles sont. Le neurocentrisme est par exemple une attitude soutenue par des présupposés nécessaires. Il est possible de dire deux choses donc qui ne sont qu’en apparence contradictoires d’une part, la conscience d’objet scientifique ou du commun en masquant les conditions d’apparaître, est source d’illusion l’objectivité est une illusion, d’autre part, la conscience en tant qu’elle est capable de devenir conscience réflexive est la source du dépassement des illusions, et de l’interrogation des présupposés. Kant fait lui aussi la différence entre phénomène et noumène. Le noumène, la chose en soi, est ce qui ne peut qu’être pensé et ne pas être connu. Il serait illusoire de croire que nous puissions la connaître. Nous n’avons accès qu’à l’apparaître des choses, qui sont en réalité conditionnée par la subjectivité transcendantale de notre espèce les phénomènes apparaissent dans l’espace et dans le temps, dans la réalité qu’il appelle Wirklichkeit », c’est-à-dire le monde du devenir, à quoi l’on ne peut pas échapper. Les noumènes sont au contraire sur un autre plan à quoi l’on ne peut pas accéder. On peut juste penser qu’il y a quelque chose à quoi l’on ne peut pas accéder et qui nous est pourtant nécessaire pour penser la cohérence du plan phénoménal. Si l’intégralité des représentations d’une chose doit avoir une cohérence, c’est qu’elles sont toutes rapportables à cette idée transcendantale, la chose en soi, qui est l’horizon unifiant de toutes les représentations que nous en avons. Elle s’esquive et s’esquisse derrière chacune des phénoménalisations que l’on en a. Les objets du monde, font partie de ces choses que l’on vise à travers les représentations que l’on a d’elles, mais les sujets conscients que nous sommes le sont aussi ; ils le sont même en premier lieu. Le noumène ici, cette chose en soi, est réellement sur un autre plan que ces entités phénoménales, car contrairement à elles qui sont soumises aux lois de la nature, qui circonscrivent le possible, et explicitent les interactions dont sont capables les objets, par des lois nécessaires, les sujets sont libres. On devine alors que cet en-soi du sujet libre est ce qui échappe par excellence à l’individu en question. Lévinas est un phénoménologue qui voit dans le rapport au visage, l’apparaître de la transcendance, quelque chose d’inobjectivable la liberté, l’absolue singularité d’autrui. L’objectivation du visage la reconnaissance faciale, le détail des éléments qui le composent… n’est pas le rapport au visage, c’est à dire à la personne. C’est le rapport à la face, à ce qui est matériel, est visible, factuellement identifiable. L’identité dont il s’agit dans cette façon de se laisser troubler par l’apparaître de l’autre, qui vient me déranger dans mon propre rapport réflexif à mon identité consciente, c’est l’ipséité. L’identité dans la différence, l’identité de la conscience avec elle même, n’est jamais figée comme dans l’en soi des choses, elle est mobile et vivante. Elle se récupère à travers l’infinie variétés des modulations vécues, des états de conscience l’autre est avant tout ce qui vient, dans une véritable rencontre, perturber ce rapport de moi à moi, en s’adressant à moi, de manière tacite, par la simple exposition de sa vulnérabilité, de la nudité de sa face, demander d’être pris en charge. Il y a quelque chose ici d’une relation singulière et éthique, qui ne peut pas être résorbée dans le déjà connu, qui s’impose comme événement et comme nouveauté. Si la relation est éthique, c’est qu’elle transforme et bouleverse ; elle impose à l’individu de s’engager, et de neutraliser sa tendance au repli, au quant à soi on ne peut pas dire, comme dans la mauvaise foi sartrienne, ce n’était pas moi », je n’y étais pas ». On est convoqué en personne. On cesse alors de jouer un personnage », de faire comme si le rôle auquel nous nous adaptons était écrit d’avance. Nous sommes démuni, jeté dans le monde, en charge de la responsabilité de nos actes, voire de la responsabilité de ce que les autres font en notre nom. La conscience en dépassant l’illusion de l’objectivité, devient véritablement éthique, sincère et engagée subjectivement, par quoi elle rencontre un éclat de vérité quant au sens de son existence. * Elève 3 L’illusion est dans sa forme sociale, une tromperie, une manipulation. L’illusionniste, est celui qui en manipulant des objets cartes, foulards, articles de foire etc. produit des effets étonnants, et inattendus. Nous nous attendons à voir quelque chose et autre chose, qui semble déroger aux lois de la causalité surgit un lapin hors d’un chapeau, une cigarette d’une oreille etc.. En allant voir un illusionniste nous nous attendons à être surpris, et nous sommes heureux de l’être quand le tour fonctionne. C’est ce qui le distingue du pick pocket on paye pour être trompé quand on va au spectacle alors que l’on est en colère de s’être fait dérober de l’argent dans l’autre cas. L’illusionniste de talent est celui qui instrumentalise nos réflexes perceptifs afin de faire croire à un enchantement, un mirage en détournant l’attention de ce qu’il y a à voir pour que l’escamotage puisse avoir lieu et que la carte réapparaisse dans un endroit que l’on ignorait auparavant, le miracle du spectacle a lieu. Personne n’est dupe, mais l’illusion n’est pas seulement celle basée sur les conventions théâtrales, faisant voir Oreste là où un acteur joue un rôle ; le tour a pris quand le trucage que tout le monde présuppose derrière l’apparence, n’apparaît pas. Il demande à ce qu’on le suive, l’écoute, il joue avec notre attention et en réalité, il se joue de notre attention, en déjouant sa vigilance. Nous sommes heureux qu’il nous trompe car nous savons qu’en réalité, le principe de non contradiction les mêmes choses produisent les mêmes effets » n’est pas déjoué. La contradiction n’est pas dans les choses, mais dans le discours qui nous demande notre confiance pour la trahir naturellement, il y a un contrat de confiance initiale qui rend étrange cette confiance que l’on donne pour se faire tromper. Cette attention qu’il nous demande est doublée par un intérêt étrange qui consiste à la fois à désirer être trompé, et en même temps, désirer relever le défi consistant confondre le truqueur, être plus malin que lui, avoir un coup d’avance sur lui. Cela arrive rarement, mais c’est ce même intérêt, très puissant, que l’on suscite quand on produit du sensationnel, quand on veut attirer par des révélations, la présentation des choses cachées les foires, les monstres, les curiosités etc. Les films de Fellini interrogent cette pulsion au cœur de l’âme humaine Ginger et Fred, Fellini Roma etc. Ces films démontrent que le trucage fonctionne encore, quand il s’agit non pas tant de le faire fonctionner, que de montrer comment il fonctionne. L’illusion, la duperie est peut être d’ailleurs d’autant plus grande qu’on prétend nous révéler l’arrière du décors. C’est là ce que dénonçait dans les années 70 Guy Debord dans la société du spectacle » rien n’échappait au règne du spectaculaire, même la critique était réintégrée au socle de cet univers qu’elle critiquait. Le critique de la société du spectacle est interviewé, passe sur les plateaux télé etc. C’est dire si la conscience est à la fois ce qui prétend distinguer le vrai du faux, et en même temps ce qui se laisse tromper alors même qu’elle se croit réaliste. Peut être que cette illusion cette demande de spectaculaire est une demande profonde de la conscience, peut être que ce besoin trahit le fait qu’elle est l’origine de cette illusion, et que c’est elle qui est la ressource de ce mensonge. La conscience qui est au spectacle est toujours en train de voir comme, et ne voit jamais que ce qu’elle sait ou prétend savoir. Elle n’est qu’en contact avec elle même et ses préjugés. Notre cerveau, par le biais de raccourcis qui lui sont nécessaires et qui sont adossés sur l’habitude laisse la place à des illusions possibles. Des croyances conscientes d’être des croyances glissent alors peu à peu dans la catégorie des croyance ignorantes d’elles mêmes des croyances qui se prennent pour le savoir. Les individus qui sont habituellement attentifs à la situation qui les environnent, deviennent caricaturaux ils répètent des gestes qu’ils ont déjà fait, dérapent en se référant à d’autres contextes qui ne sont pas les bons, et paraissent alors hors d’eux mêmes, déboussolés, décalés. Ils font rire ou ils inquiètent, ils sont semblables à des automates ou à des zombis le rire du Bergson, c est du mécanique plaqué sur du vivant ». Bergson parle d’une illusion propre à la conscience qu’il nomme illusion cinématographique ». Sa conscience fonctionne comme le cinématographe, elle recompose le mouvement à partir d’une série de position fixe. Ce serait le cœur du mensonge ce que l’on appellerait mouvement est une illusion de mouvement. Pour Bergson en effet, l’homme est avant tout, homo faber, et les exigences de cette activités fabricatrice sont telles qu’il ne doit sélectionner dans le monde que ce qui lui est utile. Ce qui est lui utile apparaît comme identifiable, c’est à dire réidentifiable, c’est à dire fixe. Il s’intéresse à ce qui est semblable et oublie ce qui diffère. Or, par excellence, ce qui diffère, c’est le passage du temps, et c’est cette conscience du temps qu’il laisse par excellence échapper. La conscience en tant que conscience fabricatrice est source de cette illusion cinématogrpahique qui consiste à ramener le mouvement à une série de positions fixes ou bien à rapporter le temps à du spatial, comme par exemple la flèche du temps d’une frise chronologique. Cette illusion est nécessaire en ce qu’elle permet la pratique, mais il est possible à la conscience de fonctionner aussi à contre emploi, de revenir sur ce qui vient avant le tournant de l’expérience » par quoi elle se spécialise ; cette conscience s’inscrit alors dans le flux vital, et reprend un contact avec l’expérience vécue du temps. Cela peut être l’expérience de la durée conscience, mais c’est aussi une expérience beaucoup plus vaste l’expérience de la vie. La conscience est à la fois en tant que conscience d’une réalité utile pour l’espèce, source d’une illusion quant à la nature véritable des choses, mais aussi capable, suite à une conversion du regard à saisir l’en soi des choses, inutile, mais vrai. Les artistes incarnent par excellence cette virtualité de la conscience se libérant des préjugés de l’usage. * Elève 4 La conscience individuelle est notre point d’entrée dans le monde. Elle jette parfois sur le monde une coloration qui est subjective et qu’elle prend pour la nature des choses. Les choses apparaissent comme autres qu’elles ne sont. C’est par exemple, le cas d’une illusion d’optique rapportée par les épicuriens, les tours au loin qui apparaissent comme carrées. Ce type d’illusion néanmoins même s’il a son origine dans le sujet les organes de la perception n’est pas à proprement parler à rapporter à la conscience elle même. La conscience est plutôt ce qui est capable, pourvue qu’elle fasse appel à l’entendement, ce qui vient corriger ce que les sens produisent. Ainsi, le jugement redresse le bâton que les sens font percevoir brisé dans l’eau Descartes. La conscience est source de vérité, et les sens d’illusions. Ils ne sont pas fiables mais trompeurs. La tromperie est extérieure à la conscience, jusque dans le cas où le malin génie viendrait à nous faire percevoir pour vrai des idées claires et distinctes alors qu’elles sont fausses. Pour autant, l’illusion, n’est pas forcément de ce type. Il peut y avoir des fantasmes qui sont plus puissants que ces illusions d’optique. Ainsi, percevoir quelque chose autrement qu’il ne l’est les tours rondes que l’on perçoit carré ; le bâton que l’on perçoit brisé etc. est autre chose que percevoir quelque chose là où il n’y en a pas. On parle alors d’une hallucination. Hamlet perçoit le corps de son père, alors qu’il est mort. Il est le seul à le percevoir. Et ce qu’il perçoit en réalité n’est rien. C’est une production de son esprit. Un esprit faux est un esprit dont la conscience fait percevoir les objets qui à l’extérieur n’existent pas. C’est une conscience qui n’a plus de rapport avec le monde extérieur mais à soi même. Par exemple, le mythomane qui croit à ses délires, et croit que le monde se conforme à ses désirs. Ou bien ces fous dont parle Descartes dans la première méditation et qui considère qu’ils n’ont pas de corps, ou que leur corps est fait de verre, qu’ils se briseront au moindre choc avec quelque chose d’extérieur. Cette illusion serait non pas due à quelque chose d’extérieur à la conscience, d’objectivable comme la modification de la température de l’air qui produit les illusions d’optiques à l’origine des mirages, mais des productions de l’esprit lui-même. La folie serait finalement le cas où la conscience ne serait plus l’instance qui nous met en contact avec le réel, mais au contraire, celle qui nous en détourne. Le fou ce serait quelqu’un dont la conscience serait malade, qui n’aurait plus accès au réel comme il se doit, et serait constamment dans une forme d’illusion appelé délire délire de persécution, où l’individu croit entendre des personnes comploter contre lui, fantasme qui consiste à percevoir des choses qui n’existent pas, affabulation où l’on raconte des histoires. Descartes met de côté ces êtres dérangés, et se dissocie de leur compagnie quand il se demande si lui-même n’est pas en train de le devenir en faisant son hypothèse hyperbolique du doute radical mais quoi, ce sont des fous ! » Michel Foucault, dans L’Histoire de la Folie le lui a bien reproché ce geste serait contemporain du grand enfermement. C’est à dire de l’époque où la construction de la réalité partagée du bon sens » dont parle Descartes au début du Discours de la Méthode est en fait rendue possible, par l’exclusion d’un certain nombre de personnes de ce partage. Il ligne de partage sépare ceux dont les représentations sont conformes avec l’ordre établi de ceux qui sont des marginaux les pauvres, les malades, les fous, les criminels etc. Cette exclusion est fondatrice de la raison plus que ne le veulent le reconnaître les personnes que favorise une telle démarcation. Ainsi, alors que la raison est le discours qui a pu rendre compte de la folie jusqu’à notre époque en niant au fou la possibilité de s’exprimer, il s’agit de faire parler la folie pour essayer de dire quelque chose sur la raison. La raison se soutient de ceux qu’elle exclut. Elle trouve son origine non pas en elle-même, mais elle se définit par différenciation d’avec ce qu’elle rejette en dehors d’elle. La violence faite aux fous, aux exclus, au nom de la raison, dit plus de choses sur elle, qu’elle même. Ce qu’elle dit d’elle est même, est en écart avec ce qu’elle est. Le savoir rationnel est lié à des techniques de pouvoir par lequel il s’impose. Les systèmes de sélection et de validation, s’auto-légitiment et se renforcent pour les personnes qui y participent car finissant par ne plus soupçonner aucune extériorité, mais finalement, ils ignorent tout extérieur possible. Il nie ce qui ne vient pas les renforcer, et produisent des effets qui relèvent aussi de l’illusions. La raison ne serait pas raisonnable, et elle sécréterait la folie en éteignant d’autres perspectives sur le monde possible, car les frappant d’invalidité. La raison serait en son fond l’origine de la folie, et la folie serait le lieu où l’on pourrait deviner les non-dits de la raison à partir de quoi elle s’éclaire. Kant avant Freud avait déjà soupçonné, que les illusions n’étaient pas seulement liées à des défaillances du sujet même si toujours à ses limites, à sa finitude, mais aussi à la nécessité. L’illusion ne serait pas une défaillance, mais quelque chose qui a une fonction de régulation pour notre psychique. Elle ne serait pas l’exception, l’écart à la norme, mais la norme elle-même, à partir de quoi il faut repenser la pathologie comme nouvelle norme. Nietzsche décrivait la grande santé comme la capacité à se rendre malade pour pouvoir produire une nouvelle norme, un nouvel équilibre, qui n’est pas prédéterminé par l’équilibre biologique hérité de l’espèce. L’être humain en tant qu’être technique, et l’être qui expérimente d’autres équilibres que ceux naturels. Il vit toujours sur le bord d’une crise, d’une catastrophe qu’il doit alors corriger par d’autres innovations qui fonctionnent comme des remèdes toujours susceptibles d’être transformés en poison. Les illusions de la raison, sont chez Kant, ce qui permet à la raison de s’orienter dans le monde. Le monde, l’âme et Dieu sont des concepts régulateurs, qui produisent des promesses, alors qu’ils ne seront jamais rejoints car la réalité qu’ils désignent n’est pas totalisable, reste ouverte. Or, ils doivent être présupposés pour se mettre à connaître si le monde n’était pas cohérent, unifié, il n’y aurait pas de sens à en chercher ses lois. Mais cette cohérence ne sera jamais que postulé. C’est la conscience en tant que fini, qui sécrète cette illusion présentable sous la forme d’antinomie il est par exemple aussi probant de dire que le monde ait eu une origine qu’il soit éternel, mais ces illusions lui sont nécessaire au bon fonctionnement. La folie est donc ce qui travers la raison la plus pure, qui se scinde en deux, devient schizophrénique, et se convoque à son tribunal critique afin de se poser des bornes. Il est sans ce détour par la question des limites de nos pouvoirs de connaître question centrale de la Critique de la Raison Pure, nous rencontre compte que l’illusion est parfois nécessaire à notre équilibre. De la même manière que certaines douleurs devenant insupportables, nous font tomber dans les vapes, de la même manière, certaines vérités sont trop intenses pour être supportée par une conscience. Dans Ecce Homo, Nietzsche parle ainsi du degré de vérité qu’un esprit peut supporter, et de la dose de vérité qu’il peut oser, comme mesure de la valeur. La vérité n’est pas soutenable, et l’illusion nous est nécessaire à vivre. Freud parle lui de dénégation. Si le réel était visible, il nous empêcherait de vivre. Cette demande de vérité n’est pas naturelle, elle est le même le signe d’une perte de vitalité. L’illusion est plus pragmatique, plus efficiente. Vivre dans le mensonge a quelque chose de rassurant. Tel est le reproche que Freud adresse à la religion il y a une part d’infantilisme. La demande adressée au Dieu par les rites et les prières, est une demande de protection qui prend la suite de la demande adressée au père quand l’homme était enfant. Cette demande reste alors que les parents s’absentent ou que les rôles s’inversent, et pour la satisfaire, l’imaginaire, produirait par idéalisation cette entité à laquelle on espère si on lui obéit obtenir la garantie de ce qui viendrait éteindre notre angoisse la vie après la mort, la guérison des souffrances etc. Telle est la thèse de L’Avenir d’une Illusion. Pour Freud la conscience, en tant qu’elle est la conséquence du refoulement de la pulsion, est une demande d’illusion. L’inconscient est la vérité de ce dont la conscience est le mensonge. Elle est étayée sur l’ignorance volontaire de pensées refoulées. Ces pensées refoulées par l’instance du surmoi garante des valeurs intériorisées de la culture, font parties intégrantes de la personnalité psychique, puisqu’elles expliquent mieux que les pensées conscientes, la plupart des actions dont la portée consiste à essayer de les contourner ce qui nécessite de les présupposer. La conscience est la source d’une illusion, dont le centre lui extérieur car résidant dans l’inconscient. * Elève 5 L’être humain est un être dont la nature est plastique. Il n’est pas défini par avance par un programme génétique, biologique aucun séquençage d’ADN ne pourra jamais prédire qui sera criminel de qui ne le sera pas. Il n’est pas plus guidé par les Dieux ou le destin. Aristote pouvait dire alors que sa place était entre les animaux et les Dieux, et qu’il devait la bien garder s’il voulait rester dans les bornes du raisonnable, ce que commande l’éthique. L’être humain est libre, car il a affaire au contingent, au possible, et qu’il peut s’y orienter grâce à sa raison. Néanmoins, cet être en devenir, et qui se définit lui même à partir de décisions orientées par les normes du rationnel, cet être qui acquiert une seconde nature des habitus qui vient rétroagir sur la première afin de découvrir un potentiel absolument insoupçonnable avant, a besoin d’illusions pour grandir et s’élever au-dessus de sa condition première. Ainsi, alors que Platon condamne l’imitation au titre de ce qu’elle productrice d’apparence et donc d’illusion, qu’elle trompe la conscience, Aristote la loue comme le ressort même de l’apprentissage. Si tous les hommes désirent apprendre, c’est par l’imitation qu’ils commencent à apprendre, et en particulier car cette imitation se fait avec un certain plaisir. Freud déjà parle du surmoi comme une instance de régulation du psychique, venant canaliser les pulsions du ça, et normer le moi, comme générer par un processus d’idéalisation. L’idéal du moi est produit par identification à des référents, déjà primaires les parents puis secondaires les personnes que l’on rencontre et donc le développement de l’enfant, est polariser par cette image de lui même qu’il trouve en dehors de lui, et qu’il se met à intégrer à son psychique et conserver en l’absence même de la personne par la suite. Cette idéalisation est ce qui permet la scission du psychique par quoi l’instance du surmoi intervient pour réguler les pulsions, les canaliser, et aider à la transformer en désir, et en même temps. Elle donne une direction, l’idéalisation creuse l’horizon et lui redonne une forme d’infini. L’infini du désir n’est pas que quand il n’est pas la répétition infinie des mêmes désirs qui aussitôt éteints renaissent à l’identique, mais l’objet d’un désir infini, qui surprend toujours et dont on prend soin, car il renouvelle le mystère de l’identification paradoxale avec lui. Descartes montre que le désir se nourrit d’une certaine illusion celle qui fait rapporter les petites filles louches à un désir d’enfance initial, et aussi soupçonne que la cristallisation peut se faire sur un défaut, indiquant que le désir fait toujours signe vers le défaut originaire dont il procède et même s’il remarque que c’est habituellement plutôt à des qualités qu’à des défauts qu’on s’attache. En effet, ce défaut originaire du désir, est cette sorte de manque que désigne Platon en rapportant la généalogie d’Eros à ponos et pénia. Ce rapport à l’idéalisation et à l’imitation montre qu’autrui est ce par quoi est médié notre rapport aux valeurs. Autrui intercède entre nous et nous mêmes, et fut-ce à titre de catalyseur, il aide la conscience à se ressaisir, soit immédiatement, au niveau pré réflexif comme par un affect soit au niveau réflexif. Le décentrement nécessaire pour se saisir comme cette difficile identité qui diffère de soi passe par l’intégration, par exemple, des représentations que les autres ont de nous et se font de nous. C’est souvent par opposition, contraste, nuance, décalage que se fait l’affirmation de soi. La conscience n’est libre que par rapport à une situation. Si bien que, puisque la conscience est liberté, elle est toujours possiblement une chose et une autre à la fois. Ces compossibles donnent raison aux illusions que l’on se fait. La conscience se nourrit de ce que l’on voit d’elle et qu’elle n’imagine pas encore pouvoir être. La conscience n’est pas seulement source d’illusions de fantasmes, de désirs, de cristallisations qui idéalisent autour d’un individu des attentes qui ne le concernent pas mais nous, mais aussi l’illusion est sa ressource. La conscience de soi se nourrit de ce que les autres voient en elle, à condition que ceux ci ne soient pas réduction. La véritable illusion, celle qui serait inacceptable et qui tend à séparer la conscience de ses possibles, c’est la réduction à l’état de chose. Autrui sa conscience en tant qu’il peut tendre à vouloir me réduire à l’état d’objet, d’outil, de moyen pour ses propres désirs, et sources de la plus pernicieuses des illusions celle qui dénature la conscience pour en faire une chose. Cette illusion n’est pas pour autant anodine, qui pourrait être désavouée par le réel. Elle prend la place du réel comme un fantasme qui est attesté collectivement. Elle relève en ce sens parfois de l’idéologie, comme c’est le cas pour le racisme les races certes n’existent pas, les biologistes l’ont montré. Mais même si ce concept est fallacieux, qu’il ne correspond à aucune réalité, ceux qui l’utilisent lui donnent une forme de réalité. Le racisme existe et les représentations qui tendent à réduire des individus à un certain nombre de caractères physiques sont réelles. En sens, la conscience en tant qu’elle est l’instance productrices des représentations, est la cause de cette illusion chosiste pernicieuse. Mais, en tant qu’elle est aussi conscience critique, elle est aussi le remède à ce poison. Par le dialogue, la distinction, l’écoute de la multiplicité des arguments, elle dépasse cette opposition entre la représentation du réel et le réel pour le voir tel qu’il est et non pas au prisme des préjugés reçus. * Elève 7 De la même manière que LaBruyère décrivait des caractères Ménalque est l’étourdi par exemple, il est possible de décrire des types psychologiques qui permettent d’identifier les individus comme appartenant à un certaine catégorie de personnes avec qui, même s’ils ne sont pas de la même famille, ils partagent des traits de caractères communs. Naturellement aucune des personnages en question n’est véritablement une personne, ce sont des idéaux types, des représentations caricaturales mais qui disent par leur univocité même, la vérité de certaines traits qui nous traversent. Nous participons de la réalité transversale qui tisse ensemble certains individus séparés physiquement, mais contigus dans cette ribambelle des vérités de comportements possibles. La conscience individuelle, qui nous fait, par le repli sur soi et la capacité à dire je » ou moi » percevoir comme radicalement différent de tout autre, fait ressentir comme étrange cette écart avec la représentation que l’on a de nous. Les autres prétendent nous connaître en ce qu’ils reconnaissent en nous quelqu’un qu’ils ont déjà connu par ailleurs. Ils nous assimilent à quelqu’un d’autre, alors qu’ils nous prétendent nous connaître nous mêmes. Ces trouble de la conscience, ces confusions, éveillent la méfiance de Descartes qui se soustrait à cette illusion en remarquant les sentiments que son inclination le poussait à ressentir en présence des jeunes filles louches ne concernent pas la personne qu’il rencontre, mais le souvenir qu’il lui évoque. Il n’est pas en présence de la personne dans sa différence irréductible, mais de sa propre conscience, en ce qu’elle se protège de l’altérité du monde et de ce qu’il y a de troublant dans une rencontre en convertissant l’hétérogénéité du réel en souvenir. On ramène l’autre au même. On rapporte tout à soi. Il faut alors ouvrir les yeux et voir non pas ce que l’on sait, mais ce que l’on voit, or rien n’est plus difficile. Leibniz et Pascal on bien vu ces difficultés le premier qui est le second historiquement a montré qu’il n’y avait pas d’entité sans identité. Une entité, avec une unité, que si elle était identique à elle même. Il déduit de cela le principe des indiscernables. C’est à dire que si deux choses sont absolument indiscernables elles ne forment qu’une seule et même chose. Si elles sont deux, c’est qu’elles sont dissemblables par certaines de leurs caractéristiques ne serait ce que leur position dans le monde, l’espace qu’ils occupent n’est pas le même, ce qui les amènent alors à différer et aussi diverger. Le devenir, leur destin sont séparés, aussi proche soit leur origine commune deux feuilles appartenant au même arbre ; deux gouttes au même nuage. Pascal remarque que le rapprochement entre deux choses que l’on sait différentes, est souvent le fait de l’esprit. C’est d’un point de vue extérieure que deux choses dissemblables peuvent être rapportées l’une à l’autre à travers une analogie, une comparaison etc. Ainsi, Deux visages semblables, dont aucun ne fait rire en particulier, font rire ensemble par leur ressemblance. » B133 L13. Pascal classe ce fragment dans le feuillet vanité » il s’agit ici de la vanité de l’observateur qui rit de ce qu’il voit de ce qu’il a mis dans le réel pour se l’approprier. Ce que masque cette projection, ce qui fait écran dans cette pratique divertissante qui consiste à distinguer ce qui est semblable de ce qui est différent, c’est le véritable travaille de l’esprit, c’est la différence profonde entre les choses. Un individus qui se contenteraient de jouer le jeu des petites différences » comme le fustige Rousseau chez le courtisans qui font grand cas de détails en semblant en tirer une différence de nature entre les gens du peuple et les aristocrates c’est qu’il finiront par s’aveugler sur la différence essentielle celle entre le paraître et l’être, entre l’apparence et l’essence justement. Les êtres humains qui se divertissent sont attentifs à de petites différences de surface, superficielles, alors qu’ils se rendent aveugles à la différence fondamental, à ce qui est décisif et fait toute la différence. Le choix de l’existence, la valeur qui à l’arrière plan de tous leurs actes restent invisible à leur yeux. Ils finissent par ne plus chercher la vérité, la croyant sinon inexistante du moins inaccessible. C’est l’illusion que produit cette projection sur le réel de ce que nous attendons de lui, et qui nous fait présumer de sa nature. L’illusion serait donc à la fois dans la conscience spectatrice qui met dans le monde ce qui l’approprie à son idiosyncrasie et dans la conscience active, qui ne cesse de différer ave celle même, tout en se percevoir comme stable et identique à elle même. La conscience se vit comme une identité à l’écart, et en ce sens de différent de tous le reste. Son attitude première et de nier l’appropriation à ce qui n’est pas elle elle ne dit rien positivement sur elle même, mais tout ce qu’on dit elle pour essayer de le qualifier, elle le refuse. Son affirmation première, consiste à dire non ». Certes, Descartes a essayé d’affirmer positivement qu’elle est chose pensante » après l’avoir refuser toutes les autres choses comme douteuses, c’est à dire illusoire. Mais cet attribut essentiel qu’est la pensée, reste assez fragile en ce qu’il ne s’assure de lui même que quand il se détourne de tout contenu qui lui est extérieur pour se saisir dans la transparence de la conscience à elle même. Certes, Descartes a fait se dissiper les illusions du monde, voire l’illusion qu’est le monde en identifiant la pensée et la conscience, en montrant qu’il n’y a pas le moindre écart, pas la moindre place pour le doute entre eux, mais cette vérité de la conscience sur elle-même, qui la fait percevoir comme une réalité res cogitans faisant échec à la duperie du malin génie reste sinon temporaire je suis, j’existe est nécessairement vraie toute les fois que je la prononce ou que je la conçois en mon esprit » 2nd Méditation du moins local cette vérité est une zone de clarté dans un océan d’incertitudes, ou tout pourrait n’être qu’illusion, des hommes qui passent et que l’on peut voir quand on se met à la fenêtre ce seraient des automates, au morceau de cire dont la forme se dissipe au contact de la flamme du bougie, jusqu’au monde qui ne serait que mirage, et aux mathématiques qu’effet de la manipulation d’un dieu pervers, falsifiant ses propres lois et décrets. La conscience qui se saisit elle même, en se croyant source de différence et d’une réalité absolument singulière, ne serait pas moins source d’illusion que celle qui se tourne vers le monde. Les types d’individus extravertis se tournent vers le monde, et savent par le jeu de l’imagination pour lequel ils ont acquis quelque habileté se tromper eux mêmes en regardant ce qu’ils veulent voir, ou découvrant ce qu’ils croient savoir, sans voir ce qu’il y a vraiment. Mais ceux qui, plus introvertis, cherchent en eux mêmes la bonne articulation au réel, le réglage de l’appariement entre leur conscience est le monde ne sont pas plus dans la vérité que les autres. Dans ce rapport à eux mêmes, la conscience n’est pas moins sous l’effet des prestiges de l’imagination que dans l’autre cas on ne se ment pas moins à soi même. Ainsi, le mensonge suprême, qualifiée de mauvaise fois par Sartre, est de se prendre pour une chose le soldat qui se fait chose, en fixant son regard à dix pas, et ne voyant pas ce sur quoi son regard ne s’arrête plus ; le garçon de café qui se coule dans une norme sociale en prétendant ne rien être d’autre ; ou la femme coquette qui fait mine de ne pas voir que sa main repose comme une chose dans les mains de celui qui la séduit. C’est bien au fond, ce que Sartre reproche à Descartes, la conscience ne peut pas être une chose la partie où le monde était réduit aux représentations, aux perspectives que le sujet jette sur lui montrait suffisamment bien que la conscience était négation. Mais il n’est pas allé suffisamment loin, la conscience n’est pas une chose, position d’une positivité, la pensée, mais elle est elle même, négativité, néant, puissance de négation et non d’anéantissement. Elle est ce qui se nie pour l’autre puisse lui apparaître. Cette conscience de son propre néant intérieur et par là de sa vanité a quelque chose d’insoutenable. C’est pour cela, qu’il faut la méthode de la métaphysique pour l’aborder, sur le plan existentiel, cela s’éprouve sous la forme de l’angoisse, ou de l’ennui, ces sentiments limites où le sujet s’abime. La mauvaise foi est la réponse qui consiste à nier ce néant, on pourrait dire à le dénier » si Sartre n’avait pas maille à partir avec la psychanalyse. L’illusion dont la conscience est la source ne peut pas concerner seulement le monde, mais aussi sa propre nature. Seule une opération singulière et contre nature, permet de la gager comme le champ de l’apparaître des phénomène et de suspendre la volonté de lui donner une substance, d’en faire une chose. Cette confusion de la conscience avec la connaissance de sa nature, s’enracine dans une confusion entre la conscience et le monde. C’est que quand elle perçoit les choses, elle est à la fois en contact avec ce qui la transcende les choses mêmes mais aussi avec ce qu’elle y met pour recevoir ce qui lui est autre. Le désir de se connaître soi même intégralement, serait équivalent alors du désir de s’identifier avec le monde. Ce serait un désir démesurée, marqué d’hubris, une forme de délire métaphysique que Kant appelle Schwärmerei enthousiasme qui fait oublier les bornes. Pour se guérir d’une telle prétention outrancière, la perspective critique donne certes une aide précieuse, mais d’autres manières moins austères son possibles. Ainsi, si le vice originaire tient à ce que la conscience est perçue comme chose, identité en soi, il s’agirait de la considérer comme différence, traversée par les tendances. L’illusion au cœur de la conscience, serait celle qui consiste à percevoir son identité comme celle des objets, une identité figée, fixée à elle même come dans l’en soi des choses. Il est possible de concevoir un autre type d’identité, qui tienne compte de ce mouvement continuel, cette fluence de la conscience qui s’inscrivant dans la durée, ne peut jamais être que dans le passage d’un état à un autre, sans jamais ne s’y arrêter c’est l’identité narrative ou ipséité. L’illusion sur l’identité à soi se voit quand on affirme être la même personne » alors que de toute évidence nous ne sommes par les mêmes entre le moment de notre enfance, et celui de notre état adulte. Les changements sont physiques, même si un air » subsistent qui nous permet de deviner au delà du changement quelque chose qui demeure. De même nous faisons l’expérience de la non permanence de notre être, l’expérience d’un changement perpétuel à nous mêmes, si bien que nous sommes d’instant en instant arraché à nous-mêmes. Nous expérimenter l’hétérogénéité, l’altérité entre sein propre, et c’est elle qui nous ferait avancer, progresser, évoluer. Ce qui se répète se sclérose, le changement s’il exprime une différence profonde nous réinvente, l’innovation s’ancre dans la continuité d’une histoire et donc d’un passé. Bergson comparait ces progrès de la conscience à une boule de neige qui en roulant accumule de la matière et grossit harmonieusement. Cette différence que nous sommes est en même temps ce qui perme de nous identifier. La différence est ici un certain rapport au temps, une certaine manière de différer le rapport au néant la mort qui devra nous emporter, une manière de faire vivre quelque chose qui résiste à cette tendance à l’entropie qui atteint le corps, et qui donne des signes, d’une nature autre que matérielle. Cette transmission qui se joue entre les générations permet de susciter le retour des manières du passé à travers des œuvres douées d’esprit les œuvres d’art qui permet de faire revivre les solutions trouvée contre la résistance de la matière. Cette différence que nous sommes, nous la trouvons aussi dans l’Essai sur les Données Immédiates de Bergson, l’exemple de ces camarades de classe qui proche un jour voient leurs destinées se séparer, et chacun suivant leur chemin trouve dans leur retrouvaille un charme particulier car c’est comme s’ils restaient le complément l’un de l’autre. Ainsi, la vie qui s’écoule demande de faire des choix, et de déclarer illusoires des possibles qui n’auront pas été réaliser pour que d’autres puissent avoir lieu choisir c’est détruire es possibles. Mais l’autre qui incarne une autre voie, qui a exploré d’autre possible nous ramène à nos virtualités qui s’avèrent réelles et il nous ramène à nous mêmes, en nous rappelant ce qu’un jour nous avions été capable de faire. Un même lien de solidarité peut se trouve à un niveau plus générationnel. Et c’est là encore, une forme de proximité entre le réel et l’illusion qui se joue au niveau de la différence, de la différenciation ici non plus entre l’apparence et l’essence, ou entre la conscience et elle même, mais entre deux camarades semblables ou proches qui suivent des lignes de destin différentes. ON pourrait imaginer que cette confusion, cette illusion nécessaire est ce qui habite également la relation âme corps que Descartes pose comme une notion primitive et que Merleau–Ponty explore avec les outils de la phénoménologie. De Descartes à Leibniz l’histoire de la pensée fait signe vers la notion de l’inconscient. Si pour le penseur français la pensée et la conscience s’impliquent mutuellement jusqu’à finir par s’identifier Leibniz doute que cette substance pensante ainsi découverte soit toujours consciente. La clarté et la distinction qui le signe d’une vérité sans phares et donc l’indication du réel, se double d’une frange qui nimbe la zone nette où il est difficile de distinguer s’il s’agit de lumière ou d’obscurité. Ces zones intermédiaires où l’accommodation n’est pas évidente permet de penser les effets de seuil, là où peuvent s’intervertir, par intermittence, ce qui apparaît comme réel et illusion. Les effets de distorsion de la perception du monde comme le phénomène de déjà vu », ou les moments crépusculaire entre chien et loup, ou l’ami et l’ennemi ne se distinguent plus nettement, où le familier devient étrange, voire inquiétant l’Unheimlichkeit du parle Freud, et qu’illustre le Horlà de Maupassant, sont des situations très favorable à la pensée baroque où le roi est vu comme le plus misérable des hommes car ne pouvant pas se passer de divertissement, où le bouffon se conçoit comme sage car seul à assumer la folie du monde comme dans La Nuit des Rois de Shakespeare. C’est dans ces phénomènes de marges, de franges, que la pensée de la traversée des seuils qui restitue le principe de continuité au-delà des ruptures que l’on observe. Ainsi, quand Leibniz nous parle des petites perceptions, du bruit des vaguelettes imperceptibles en soi, dont le bruit est en dessous du seuils de la conscience que l’on peut en avoir, mais qui agrégées les unes aux autres produisent l’impressionnant mugissement d’une vague roulant sur la plage, il nous montre comment au cœur du monde, de sa présence, l’illusion ici confusion des sens, est nécessaire. La rumeur du monde ne nous atteint dans le repli de notre conscience monadique, fermée sur elle même, close au point d’être sans porte ni fenêtre » qu’à travers des fils qui la tisse par avance à tous les autres atomes de conscience et qui vibrent et qui s’entre-expriment mutuellement depuis le point de vue qu’ils ouvrent sur la totalité. C’est donc en approfondissant au lieu où toutes les confusions se font notre pensée, perception voire volonté du monde, que nous pourront explorer dans sa richesse et son ambiguïté. Cette étoffe dont Shakespeare dit que nous sommes fait, et qui est de la même nature que celle des songes, il s’agit d’en explorer les replis à travers une synesthésie de nos sensations, au risque d’une confusion de nos sentiments, afin de rendre compte de la richesse complexe du monde pris dans un écheveau de possibles non toujours réalisés. L’illusion est le lieu où la conscience se mêle au monde avec quelque confusion et dans l’épaisseur de cette étoffe, de cette chair, se trouve la possibilité d’un rapport complexe au réel. L’illusion est le lieu où se trame notre rapport au réel. Cette confusion originaire que la Phénoménologie de la Perception de Merleau–Ponty explore et que la peinture charnelle de Cézanne démontre et enrichit, c’est ce qui chez Descartes se nomme union de l’âme et du corps ». C’est à travers cette union, par lequel l’âme n’est pas dans le corps comme un pilote en son navire c’est à dire qu’il est immédiate uni à lui, à tel point que dans l’expérience le monisme englobe le dualisme métaphysique inévitable si l’on suit la réduction du doute hyperbolique, que nous avons accès au monde, et que nous sommes par là même uni à lui, puisque notre propre corps est lui même partie du monde. A la fois sujet et objet, élément du monde, à partir de quoi le monde m’apparaît. Ce chiasme qui fait que se révèle à moi ce qui m’englobe par ailleurs alors que je tends de le comprendre, est l’expérience originaire à partir de quoi tout se pense. La reprise de cette circulation par quoi on se découvre partager une même nature, le monde et moi, fait que la pensée et aussi un forme de pansement qui tend à réduire cet écart, cette schize, ou béance qui s’ouvre avec le sentiment de l’absurde, ou de l’irréductibilité de mes désirs à l’ordre indifférent des choses. L’illusion qu’est cette confusion primordiale, est à la fois l’expérience du démenti de cette illusion, et ce qui guérit la blessure d’un tel écart par laquelle je me sens extérieur à ce qui arrive, voire à ce qui m’arrive. L’illusion de la confusion qu’est l’expérience, vient rendre possible l’examen du vrai, en même temps que réduire la douleur tragique fomentée par la tension duelle entre l’esprit et la matière. L’illusion a donc une portée thérapeutique aussi bien qu’herméneutique. La conscience est source d’illusion, mais c’est en ce sens même qu’elle est capable de vérité. Si la confusion de la vie ne la faisait pas sourdre d’elle même, elle ne rencontrerait jamais les choses et ne pourrait pas reconquérir sur le disjointement initial, la possibilité d’un discours vrai. Le mathématique elles-mêmes, que Desanti disait être ni du ciel ni de la terre cf. les Idéalités Mathématiques sont susceptibles pour se soutenir elle mêmes, d’invention, et d’usage de forme d’illusions. Les nombres imaginaires i = -1 sont des pétitions, des demandes qui redoublent les nombres réels, afin de permettre la solution de problèmes avec des complexes. L’imaginaire et avec lui l’illusion n’est plus ce qui s’oppose au réel, mais ce qui le complète et qui l’éclaire. Il est le détour nécessaire. Et si la source est capable de réalisme, de rencontrer le réel, c’est parce qu’elle est capable de faire preuve d’imagination par quoi elle tend à construire des médiations vers lui, pour en révéler la complexité passionnante.
Dégagezl’intérêt philosophique de ce texte à partir de son étude ordonnée. « En vain dirait-on que tous les gouvernements sont, ou devraient être fondés initialement sur le consentement populaire, dans la mesure où les nécessités des affaires humaines le permettent. Car cela va entièrement dans mon sens. 2. La conscience de soi I. DEFINITION L'expression "conscience de soi" peut avoir deux sens → 1. Elle désigne la connaissance qu'a l'homme de ses pensées, de ses sentiments et de ses actes. → 2. Elle désigne la capacité qu'a l'homme de faire retour sur ses pensées ou ses actions. Généralement on considère que la conscience de soi est le propre de l'homme. La conscience de soi institue l'homme comme un sujet, c'est-à-dire comme un être entretenant des rapports particuliers au monde et à lui-même, qui le distinguent des autres espèces vivantes. L'ensemble de ces rapports particulier est généralement désigné sous le terme de "pensée" Descartes ou de spiritualité Hegel. -a La conscience est l'essence de la pensée • Le premier philosophe a avoir produit une définition claire de la conscience de soi est Descartes au XVII° siècle. Rappel LIENS Explication de texte Descartes - le doute méthodique première méditation métaphysique Explication de texte Descartes -la découverte du Cogito seconde Méditation métaphysique, quatrième partie du discours de la méthode Dans le Discours de la méthode, Descartes est à la recherche d'une vérité qui puisse mettre le doute sceptique en échec. Au terme du doute méthodique qui porte sur la totalité de nos connaissances et des choses existant, surgit une certitude qui échappe au doute le cogito, "je pense, je suis". Cette vérité primordiale, "je pense, je suis" , est pour Descartes le fondement de toute philosophie. Elle permet de distinguer l'âme comme une substance distincte du corps qui définit la nature ou l'essence de l'homme. L'homme est par définition un être ou une substance pensante. Cette pensée ou savoir immédiat Je suis un être pensant. La pensée constitue la forme particulière de mon existence que l'homme possède sur lui-même, est ce que Descartes appelle la conscience, laquelle est donc toujours une conscience de soi. - b Kant la conscience de soi est le privilège de l'homme. Pour Kant il n'existe pas dans le monde, un être à part, ou une substance pensante caractérisant l'homme. Le Je est pour lui simplement un principe par lequel nous organisons nos pensées. Cela n'empêche pas que cette façon de penser ou d'organiser nos pensées en les rapportant à soi, caractérise l'homme et le distingue des autres espèces. Texte Une chose qui élève infiniment l'homme au-dessus de toutes les autres créatures qui vivent sur la terre, c'est d'être capable d'avoir la notion de lui-même, du Je. C'est par là qu'il devient une personne ; et grâce à l'unité de conscience qui persiste à travers tous les changements auxquels il est sujet, il est une seule et même personne. La personnalité établit une différence complète entre l'homme et les choses, quant au rang et à la dignité. A cet égard, les animaux font partie des choses, dépourvus qu'ils sont de raison et l'on peut les traiter et en disposer à volonté. Alors même que l'homme ne peut pas encore dire Je, il a déjà cette idée dans la pensée, de même que doivent la concevoir toutes les langues qui n'expriment pas le rôle de la première personne par un mot particulier lorsqu'elles ont à l'indiquer. Cette faculté de penser est l'entendement. Mais il est à remarquer que l'enfant, lorsqu'il peut déjà s'exprimer passablement, ne commence à parler à la première personne, ou par Je, qu'assez longtemps après une année environ. Jusque là, il parle de lui à la troisième personne Charles veut manger, marcher, etc. Lorsqu'il commence à dire Je, une lumière nouvelle semble en quelque sorte l'éclairer ; dès ce moment il ne retombe plus dans sa première manière de s'exprimer. - Auparavant, il se sentait simplement ; maintenant, il se pense. Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique Explication du texte Dans ce texte Kant répond à la question "Qu'est-ce qui définit l'homme et le distingue des autres espèces vivantes ?" . Ce qui caractérise l'homme c'est qu'il possède la capacité de dire Je, de se retourner sur moi-même pour se constituer comme une conscience de soi ou un sujet. Plus qu'une distinction, cette capacité est un privilège qui "élève l'homme au-dessus des autres créatures". Parce qu'il est un sujet, un Je , l'homme est un être à part dans le monde. Le sujet ou le je est à la fois le principe qui nous permet d'organiser nos pensée d'une certaine façon, ce qui détermine un rapport particulier au monde, aux objets extérieurs et à nous mêmes, mais c'est aussi une valeur qui nous donne une dignité. •Pour Kant le sujet est d'abord un principe d'identité. Contre Descartes qui posait l'existence d'une substance pensante, la conscience n'est que le principe par lequel l'homme est capable de synthétiser et d'organiser la diversité des impressions reçues. Elle établit un lien entre les différents éléments qui constituent notre représentation du monde et de nous-même, en les ramenant à un Je considéré comme permanent et identique à lui-même - malgré la succession des états qui peuvent l'affecter. Kant s'appuie ici sur la critique faite par David Hume à Descartes, et la dépasse. Si j'examine ce qui se passe au plus profond de moi, nous dit D. Hume, je ne saisis que des impressions particulières. Je ne fais jamais l'expérience de quelque chose qui serait le moi. Le moi n'a donc pas d'existence. Cependant nous dit Kant, même si je ne peux pas prouver l'existence du moi, dans l'expérience je ne peux faire autrement que de ramener ces expériences particulières à un principe unificateur qui est le moi. • Mais le Je est aussi un sujet moral, une personne. Il est aussi porteur d'une valeur absolue qui place l'homme au-dessus de toutes les autres créatures ou choses. L'homme en tant que sujet disposant d'une raison, c'est -à-dire de la capacité de juger, est l'auteur de ses représentations. Il est une volonté, un "je veux" libre, autonome déterminé par personne d'autre que par lui-même. En tant que volonté libre , il est le seul être dont qu'on ne peut pas "disposer à volonté". En effet, si l'homme est un sujet auteur de ses pensées et de ses actions, cela signifie qu'il n'est jamais un moyen ou un instrument que l'on peut utiliser pour réaliser autre chose, comme le sont les choses de la nature ou les objets. L'homme est toujours une fin en soi. Tout ce que l'homme veut a pour finalité l'homme. •Le je comme fonction de l'entendement c'est-à-dire comme faculté par laquelle nous pensons les objets au moyen de concepts est universel. Tous les hommes, même ceux qui ne possèdent pas de mots particuliers dans leur langue, possèdent cette fonction, bien qu' elle n'apparaisse que tardivement chez l'enfant. En effet dès que cette capacité se manifeste, elle constitue un moment irréversible et fondamental dans le développement de l'homme. L'homme ne naît pas homme, il le devient. Dans la petite enfance, l'homme est comme un animal, simplement capable de se sentir, de se percevoir par une connaissance intuitive et immédiate. Lorsqu'il acquiert la conscience de soi, l'homme accède à la pensée, à l'activité intellectuelle qui lui permet de prendre du recul vis-à-vis de lui-même et de se saisir comme un sujet. A ce stade on peut dire que l'individu entre dans l'humanité. La conscience de soi est donc le signe de l'humanité dans l'homme. c Hegel la conscience est le fruit d'un double mouvement théorique et pratique LIEN Explication de texte HEGEL Conscience, Désir et Altérité Texte L'homme est un être doué de conscience et qui pense, c'est-à dire que, de ce qu'il est, quelle que soit sa façon d'être, il fait un être pour soi. Les choses de la nature n'existent qu'immédiatement et d'une seule façon, tandis que l'homme parce qu'il est esprit, a une double existence ; il existe, d'une part, au même titre que les choses de la nature, mais d'autre part , il existe aussi pour soi, il se contemple, se représente à lui-même, se pense et n'est esprit que par cette activité qui constitue un être pour soi. Cette conscience de soi l'homme l'acquiert de deux manières Primo théoriquement, parce qu'il doit se pencher sur lui-même pour prendre conscience de tous les mouvements, replis, penchants du coeur humain et d'une manière générale se contempler, se représenter ce que la pensée peut lui assigner comme essence, enfin se reconnaître exclusivement, aussi bien dans ce qu'il tire de son propre fond que dans les données qu'il reçoit de l'extérieur. Deuxièmement, l'homme se constitue pour soi par son activité pratique, parce qu'il est poussé à se trouver lui-même, à se reconnaître lui-même dans ce qui lui est donné immédiatement, dans ce qui s'offre à lui extérieurement. Il y parvient en changeant les choses extérieures, qu'il marque du sceau de son intériorité et dans lesquelles il retrouve ses propres déterminations. L'homme agit ainsi, de par sa liberté de sujet, pour ôter au monde extérieur son caractère farouchement étranger et pour ne jouir des choses que parce qu'il y retrouve une forme extérieure de sa propre réalité. Ce besoin de modifier les choses extérieures est déjà inscrit dans les premiers penchants de l'enfant ; le petit garçon qui jette qui jette des pierres dans le torrent et admire les ronds qui se forment dans l'eau, admire en fait une oeuvre où il bénéficie du spectacle de sa propre activité. Hegel, Esthétique Explication du texte • Dans le premier paragraphe, Hegel définit la spécificité de l'homme la conscience de soi. La conscience de soi se distingue ici de la conscience qui renvoie à la perception immédiate du monde. La conscience de soi est fondamentalement réflexive "pour soi", elle est ce qui constitue à proprement parler la pensée. L'homme est un être doué de conscience et qui pense, c'est-à-dire que de ce qu'il est, qu'elle que soit sa façon d'être, il fait un être pour soi. Dans le vocabulaire hégélien repris plus tard par Sartre l'être pour soi désigne l'être doté d'une conscience de soi par opposition à l'être en soi, qui désigne les choses de la nature. Cette distinction pour soi/en soi est explicité dans la suite du premier paragraphe. Les choses de la nature n'existent qu'immédiatement et d'une seule façon, tandis que l'homme parce qu'il est esprit, a une double existence ; il existe d'une part au même titre que les choses de la nature, mais d'autre part, il existe aussi pour soi, il se contemple, se représente à lui-même, se pense et n'est esprit que par cette activité qui constitue un être pour soi. Hegel reprend la distinction posée dès la première ligne entre conscience et pensée en opposant deux façon d'être au monde, celle des choses de la nature, et celle de l'homme. Les êtres vivants sont "conscients" de leur milieu, ils sont pris dans un système d'interactions avec leur environnement. Ces relations sont immédiates. L'animal est donc en continuité avec le milieu naturel il est la nature dans la nature. Il se vit dans une relation d'extériorité à lui-même. L'homme dans son rapport au monde et à lui-même, est pris par contre dans une relation "dédoublée". 1 L'homme est aussi un être vivant, naturel et il est donc aussi, en tant qu'être naturel pris dans cette relation immédiate à la nature. Mais - et c'est ce qui est important car c'est là que réside la différence - 2 il est aussi capable de prendre du recul vis-à-vis de cette nature, de sortir de l'immédiateté de cette relation, pour se considérer en particulier, pour s'observer, dans sa relation à la nature. Ce mouvement de mise à distance du monde ce que Husserl appellera l'épochè et de retour sur soi-même définit la conscience de soi ou plus généralement l'activité de la pensée qui caractérise l'homme. Remarque Pour décrire ce mouvement par lequel l'homme se retire du monde pour s'observer dans le monde, Bernard Stiegler prend l'exemple du poisson volant, qui par intermittence se tient au dessus de son milieu naturel. • La conscience de soi se constitue de deux façons, nous dit Hegel. Cette conscient de soi, l'homme l'acquiert de deux façons Primo théoriquement...... → La conscience de soi se constitue de façon théorique par la connaissance spéculative qui amène un sujet a se connaître, a se prendre comme objet de ses propres pensées. Hegel nous renvoie ici à la tradition philosophique. Depuis Saint Augustin et Descartes, la philosophie étudie la formation de la conscience de soi ou du Cogito en se limitant au point de vue spéculatif ou théorique. Saint Augustin dans Les Confessions examinait par l'introspection les replis du coeur et de l'âme humaine, Descartes voyait dans la conscience de soi l'essence de l'homme. → Ce que la tradition philosophique n'a pas vu ou a minoré, c'est que la conscience de soi se constitue aussi dans l'activité pratique. Deuxièmement l'homme se constitue pour soi par son activité pratique, parce qu'il est poussé à se trouver lui-même, à se reconnaître lui-même dans ce qui lui est donné immédiatement, dns ce qui s'offre à lui extérieurement. Avant d'être doté d'une faculté spéculative, l'homme est un être de désir " il est poussé.... Cette détermination est essentielle chez Hegel Si l'homme pense c'est parce qu'il désire, c'est parce que sa nature désirante l'amène à agir, à se confronter à une réalité extérieure. L'homme est d'abord un être de besoins. En effet, pour survivre l'homme et satisfaire ses besoins, l'homme doit travailler, c'est-à-dire transformer les choses de la nature pour produire des biens utiles à son existence. Dans travail de transformation la nature, l'homme s'exprime non pas comme un animal qui serait guidé par son instinct, mais comme un être doté de pensée c'est-à- dire capable de prendre du recul par rapport à son activité, capable de s'observer dans cette activité et de se donner à lui-même les fins de son activité. Il y parvient en changeant les choses extérieures qu'il marque du sceau de son intériorité et dans lesquelles il retrouve ses propres déterminations. L'homme qui transforme la nature, "humanise" le milieu dans lequel il vit. Même s'il utilise les lois de la nature, l'homme produit un milieu artificiel, culturel dans lequel s'exprime la volonté de l'homme. Ainsi lorsque l'homme observe le produit de son travail, ce qu'il y retrouve ce n'est pas la nature mais l'homme. L'activité pratique permet à l'homme de se réaliser concrètement dans ses oeuvres, comme une conscience de soi. C'est parce qu'il est cet être agissant dans la nature qu'il pourra ensuite par la spéculation se découvrir et de se connaître tel qu'il est, s'admirer dans son oeuvre comme l'enfant "qui bénéficie du spectacle de sa propre activité". En conclusion, ce que Hegel appelle la pensée ou la vie de l'esprit ou la pensée, ne se limite à l'activité spéculative ou théorique. Elle englobe l'ensemble des activités par lesquelles le l'humanité s'émancipe du règne de la nature et se réalise comme une conscience de soi libre capable de se donner à elle-même ses propres fins. Ce mouvement de réalisation de l'humanité prend la forme de l'histoire. - d La conscience de soi ne se réalise que dans le rapport à autrui Hegel La lutte pour la reconnaissance comme lutte à mort. C'est dans l'histoire, c'est-à-dire dans le monde des affaires humaines, et pas dans la nature, que l'homme accèdera à une véritable conscience de soi. Pour s'affirmer comme une conscience de soi existant pour soi, l'homme besoin d'autrui. Pour être l'homme a besoin de se confronter à un autre désir qui le reconnaisse dans son essence véritable, c'est-à-dire qui le reconnaisse comme une conscience de soi ou un sujet libre de toute déterminations. Autrement dit, pour s'abstraire de la vie biologique et entrer pleinement dans l'humanité, la conscience doit montrer qu'elle n'est pas attachée à la vie - ou à la survie - qu'elle est au-dessus des déterminations biologiques de la vie. La conscience de soi n'a qu'un seul but, s'affirmer comme conscience de soi pour soi. Ainsi dans la rencontre d'autrui, chacune des deux consciences veut être reconnue comme une liberté existant pour soi et pour rien d'autre, c'est-à-dire n'étant déterminée par rien d'autre que sa propre volonté. Je ne peux m'affirmer comme une liberté que si j'affirme mon pouvoir, ma volonté ou mon désir sur une autre volonté ou sur un autre désir. Ainsi la rencontre des consciences ne peut être que conflictuelle, chacune cherchant à dominer l'autre. Le conflit des consciences prendra la forme d'une lutte à mort. Ce n'est qu'en mettant sa vie en jeu que chaque conscience pourra s'affirmer comme une volonté ou un sujet absolument libre. voir la dialectique du maître et de l'esclave LIEN Cours le travail et la technique II. LES CRITIQUES DE LA CONSCIENCE - a La conscience de soi n'est pas nécessairement synonyme de connaissance de soi. Si personne ne nie que la spécificité de la pensée humaine réside dans la capacité réflexive par laquelle l'homme se pose comme le sujet de ses pensées ou de ses actes, beaucoup de penseurs vont remettre en question l'affirmation cartésienne selon laquelle la conscience de soi est toujours synonyme de connaissance de soi. • Pour PASCAL XVII° siècle, " l'homme n'est que déguisement, que mensonge et hypocrisie". Aussi bien vis-à-vis des autres, mais aussi vis-à-vis de lui-même. "Il ne veut pas qu'on lui dise la vérité, il évite de la dire aux autres...". Cette disposition à vivre dans l'illusion s'enracine au plus profond du coeur humain. Elle est dans la nature même de l'homme. Ainsi l'homme est condamné à la méconnaissance de lui-même. • David HUME XVIII° siècle est un philosophe empiriste, c'est-à-dire que toute connaissance ou tout savoir se fonde sur l'expérience ou l'habitude. Sur cette base, il remet en question l'existence d'un moi ou d'une "substance pensante". Selon lui tous les éléments qui constituent notre psychisme proviennent directement ou indirectement de l'expérience. Ainsi le moi ou la supposée conscience intime du moi n'est qu'une suite de perceptions particulières. Jamais je ne parviens à me "percevoir moi-même" comme une unité distincte ainsi que le pensait Descartes. Il n'existe donc pas un être ou une substance qui serait le moi. Texte "Il y a des philosophes qui s'imaginent que nous avons à tout instant la conscience intime de ce que nous appelons notre moi¹; que nous sentons son existence et sa persévérance dans l'existence, et que nous sommes certains par une évidence au-dessus de toute démonstration, à la fois de son identité et de sa simplicité. [...] Pour moi, quand je pénètre au plus intime de ce que j'appelle moi-même, c'est toujours pour tomber sur une perception particulière ou sur une autre une perception de chaud ou de froid, de lumière ou d'obscurité, d'amour ou de haine, de peine ou de plaisir. Je ne puis jamais arriver à me saisir moi-même sans une perception, et jamais je ne puis observer autre chose que la perception. [...] D. Hume, Traité de la nature humaine ¹ Le moi est la conscience de l'individualité. Il désigne ici une réalité permanente et invariable, identique, simple. Ce que Descartes appelle une substance. - b La conscience de soi ne représente qu'une petite partie de notre appareil psychique La critique la plus décisive sera celle de FREUD qui démontrera avec l'invention de la psychanalyse, que la conscience de soi ne constitue qu'une petite part de l'activité du psychisme humain et que le moi est loin d'être le "maître dans sa propre maison". Au contraire, il est tiraillé entre les exigences de trois despotes le monde extérieur , le surmoi et le ça. Texte 1. La psychanalyse décentre l'homme du moi. Trois grandes révolutions ont renouvelé notre représentation de l'homme La révolution copernicienne qui sera à l'origine de la révolution scientifique du XVII° siècle. Celle-ci nous fait passer d'une conception géocentrée de l'univers, à une conception héliocentrée . La révolution darwinienne qui explique la variabilité des espèces par le phénomènes de sélection naturelle, ainsi que l'origine liée des espèces vivantes qui dérivent les unes des autres par transformations successives. La révolution freudienne liée à la découverte de l'Inconscient qui remet en question notre représentation de l'homme héritée de Descartes. Dans le cours des siècles, la science a infligé à l'égoïsme naïf de l'humanité deux graves démentis. La première fois, ce fut lorsqu'elle a montré que la Terre, loin d'être le centre de l'univers, ne forme qu'une parcelle insignifiante du système cosmique dont nous pouvons à peine nous représenter la grandeur. Cette première démonstration se rattache pour nous au nom de Copernic [...] Le second démenti fut infligé à l'humanité par la recherche biologique, lorsqu'elle réduisit à rien les prétentions de l'homme à une place privilégiée dans l'ordre de la création, en établissant sa descendance du règne animal et en montrant l'indestructibilité de sa nature animale. Cette dernière révolution s'est accomplie de nos jours à la suite des travaux de C. Darwin, de Wallace et de leurs prédécesseurs, travaux qui ont provoqués la résistance la plus acharnée des contemporains. Un troisième démenti sera infligé à la mégalomanie humaine par la recherche psychologique de nos jours qui se propose de montrer au moi qu'il n'est seulement pas maître en sa propre maison, qu'il en est réduit à se contenter de renseignement rares et fragmentaires sur ce qui se passe, en dehors de sa conscience dans sa vie psychique. [...] Freud, Introduction à la psychanalyse, 1916 • L'inconscient est le noyau de notre être. Il est ce sujet inconnu du moi. "Le noyau de notre être ne coïncide pas avec le moi. C'est le sens de l'expérience analytique, et c'est autour de cela que notre expérience s'est organisée, et a déposé des strates de savoir qui sont actuellement enseignées". Jacques Lacan, Le Séminaire II Texte 2. Les difficultés existentielles du moi Si on examine le fonctionnement des instances psychiques, il constitue une menace permanente pour le moi. Un proverbe met en garde de servir deux maîtres à la foi. Le pauvre moi¹ est dans une situation encore pire, il sert trois maîtres sévères, il s'efforce de concilier leurs revendications et leurs exigences. Ces revendications divergent toujours, paraissent souvent incompatibles, il n'est pas étonnant que le moi échoue si souvent dans sa tâche. Les trois despotes sont le monde extérieur, le surmoi² et le ça³ . Quand on suit les efforts du moi pour les satisfaire tous en même temps, plus exactement pour leur obéir en même temps, on peut regretter d'avoir personnifié ce moi, de l'avoir présenté comme un être particulier. Il se sent entravé de trois côtés, menacé par trois sortes de dangers auxquels il réagit, en cas de détresse par un développement d'angoisse [...] Freud, Nouvelles conférences d'introduction à la psychanalyse Explication du texte A partir de 1920, Freud présente une nouvelle représentation de l'appareil psychique connue sous le nom de "Seconde Topique". • La "Première topique" divisait l'appareil psychique en trois instances le conscient qui a en charge la réponse de l'individu aux exigences de la vie, le préconscient, qui est l'ensemble des souvenirs disponibles, l'inconscient, constitués par les souvenirs refoulés qui ne plus redevenir conscients. Une force la censure empêche le refoulé de parvenir à la conscience, si ce n'est de façon déguisée comme dans le rêve ou dans les symptômes pathologiques. • La " Seconde topique". Freud est conduit à réélaborer sa représentation de l'appareil psychique afin de poser l'existence de forces inconscientes encore plus primitives que les désirs refoulés. Cette nouvelle division du psychisme distingue - le Moi¹ qui est le centre d'adaptation à la réalité. Il est chargé de l'unité du sujet. Il est pris entre deux exigences contraires l'adaptation du monde extérieur principe de réalité et la maîtrise des forces inconscientes dirigées par le principe de plaisir. - le Ça³ qui est le réservoir des pulsions inconscientes. Le propre de ces pulsions est d'être impersonnelles, décousues. Il est possible de détourner, de refouler ou de sublimer une pulsion, mais non de la détruire. - le Surmoi² est issu de l'intérorisation des règles morales extérieures, des contraintes exercées par les parents et les éducateurs, non pas tels qu'ils sont mais tels qu'ils apparaissent à l'enfant et tels qu'ils ont été eux-mêmes modelés par leur propre surmoi. Il se manifeste par l'injonction "tu dois être ainsi". Des tendances trop sévères de la censure du surmoi peuvent se transformer en véritables agressions contre l'individu. Le Surmoi forme donc un noyau tout aussi obscur et inconscient que les pulsions du Ça. Mots clés conscience de soi, connaissance de soi, conscience pour soi, pensée, sujet, personne, lutte pour la reconnaissance, moi, ça, surmoi Ondoit accéder à la conscience de soi pour être libre.Cette idée semble aller de soi. En effet elle est au cœur de tout projet philosophique comme de toute approche psychanalytique. Ce que nous disent Descartes, Malebranche, Kant et tant d’autres, c’est que la liberté n’est qu’une illusion aussi longtemps que nous n’avons pas « pris conscience Fiche de cours la conscience Conscience psychologique La conscience est étymologiquement un savoir » accompagnant l'existence, la pensée et l'action d'un sujet. Comme présence à soi et aux choses, la conscience est dite psychologique. I/ Conscience morale En se distanciant des objets sur lesquels elle porte, la conscience peut les juger elle peut évaluer ce qui est les faits d'après ce qui doit être les valeurs. En ce sens, la conscience est morale. A La conscience peut-elle nous tromper ? La conscience, illusion du sujet ? La conscience est ambiguë si rien n'est connaissable sans elle comment savoir quelque chose sans en avoir conscience ?, elle n'en est pas moins sujette à l'erreur et à l'illusion. En effet, le sujet tend à prendre ce dont il a conscience son point de vue particulier pour la seule réalité existante, et ainsi à s'illusionner sur le réel. Le sujet, illusion de la conscience ? Or, l'illusion fondamentale du sujet conscient ne porte-t-elle pas sur lui-même ? La conscience d'être un sujet véritable n'est-elle pas la plus grande illusion ? Kant nous assure du contraire Le je prouve que j'agis par moi-même, que je suis un principe et non un résultat ». Se dire libre c'est se poser comme le sujet de ses actions et de sa pensée c'est moi qui agis et qui pense. C'est avoir conscience de soi comme d'un être ayant une identité personnelle unifiée, stable, et capable de se déterminer lui-même. Mais cette conscience est-elle fiable ? La conscience d'exister comme sujet pensant prouve-t-elle vraiment l'existence d'un tel sujet, ou n'est-elle qu'une illusion ? Faut-il dire cogito je pense » avec Descartes, ou cogitatur ça pense » avec Nietzsche ? Mais si le sujet n'existe pas comme principe, disparaît-il alors moralement, c'est-à-dire comme valeur ? L'idée de sujet conscient perd-elle toute valeur ? La réponse de Descartes Le doute retourné contre le scepticisme C'est pour vaincre le scepticisme, donc pour fonder le dogmatisme établir quelque chose de ferme et de constant dans les sciences », que Descartes entreprend de douter de tout. En effet, il voit dans le doute le moyen d'atteindre l'indubitable une pensée absolument certaine résistant absolument au doute. Ce doute méthodique repose principalement sur les arguments du rêve ne produis-je pas moi-même toutes mes pensées ? et du malin génie ne serais-je pas le jouet d'un être trompeur ?. Quelle garantie ai-je d'être bien réglé » ou bien calibré » comme on le dit d'un instrument de mesure ? Qu'est-ce qui me prouve que ce à quoi je pense existe vraiment et que mes idées correspondent à la réalité ? Le cogito je pense donc je suis Descartes découvre qu'une pensée résiste au doute c'est qu'il est vrai que j'existe, moi qui pense cogito, — si je n'existais pas, je ne pourrais ni penser ni douter de mon existence ! Je ne peux pas ne pas être, quand je pense que je suis. L'existence du sujet pensant ou doutant est une évidence indubitable. Mais que suis-je ? Je suis une chose pensante », une substance pensante et consciente un sujet absolu, un esprit, une âme. La conscience est l'évidence fondamentale, la connaissance constituant le fondement et le modèle de toute vérité . Comment trouver des cours de philo ? B Avoir conscience, est-ce juger ? Une relation de soi aux choses et de soi à soi Selon l'étymologie latine, la conscience est un savoir accompagnant quelque chose. Elle signifie donc que quelque chose est su par le sujet ; le sujet se sait en relation avec une réalité, perçue plus ou moins clairement. Conscience psychologique et conscience morale La conscience peut porter sur des faits ce qui est ou sur des valeurs ce qui doit être. Dans le premier cas, la conscience est dite psychologique. Elle est spontanée et/ou réfléchie. Son objet est extérieur les choses ou intérieur la vie subjective ; présent attention..., passé souvenir, regret... ou futur attente, projet... ; possible hypothèse... ou impossible imagination, illusion.... Elle émet des jugements de fait ou d'existence il y a ceci, ceci est cela…. Dans le second cas, la conscience est dite morale elle émet des jugements de valeur. Elle est alors comme un juge intérieur, évaluant ce qui est faits, actes, pensées… d'après ce qui doit être, c'est-à-dire d'après des valeurs ou des normes morales, religieuses, politiques, juridiques, esthétiques.... Toute conscience est-elle morale ? Mais faut-il vraiment séparer la conscience psychologique de la conscience morale ? Ne serait-ce pas, comme le dirait Descartes, prendre une distinction formelle valable seulement en pensée pour une distinction réelle valable dans la réalité ? En effet, toute conscience est toujours un certain écart par rapport à ce qui est. Or, toute prise de distance n'implique-t-elle pas une certaine évaluation et un certain choix ? La conscience n'est-elle pas alors essentiellement morale ? La réponse de Alain La conscience fait face à ce qui est... Perdre conscience s'évanouir, c'est cesser d'être présent à soi et au monde. Au contraire, revenir à soi, c'est revenir au monde, c'est-à-dire précisément à autre chose que soi » Paul Valéry. La conscience psychologique fait qu'un être n'est pas seulement dans le monde une chose parmi les choses, mais est aussi devant le monde un sujet face à un objet, ou face à d'autres sujets . ... et le juge au nom des valeurs Or, parce qu'elle est l'acte par lequel l'esprit se dédouble et s'éloigne à la fois de lui-même et des choses », la conscience permet la reprise critique de ce qui est. Parce qu'elle oppose ce qui doit être la norme à ce qui est le fait, la conscience est toujours morale elle juge et elle incite à rectifier ce qui n'est pas fidèle à ses valeurs. La morale consiste à se savoir esprit et, à ce titre, obligé absolument car noblesse oblige », conclut Alain.
\n\n \n la conscience de soi est elle trompeuse
Elleactive le processus de conscience de soi et d'évolution, en même temps qu'elle nous apprend à communiquer d'une façon plus intuitive, avec le monde et plus directe avec les autres. L'interprétation et l'analyse du rêve permettent à l’individu de se reconnecter avec son désir profond ou le soi intérieur (le mandala intérieur selon Jung). Cette approche permet L'analyse du professeur Dans Les confessions, Rousseau explique qu’il se souvient de certains épisodes traumatiques de son enfance qui ont fait naître en lui le sentiment de l’injustice. Cette narration que l’on retient souvent sont le nom du ruban volé » ou du peigne cassé » est le récit d’une prise de conscience de soi lors de laquelle le jeune Rousseau réalise que le monde ne correspond pas nécessairement à ses désirs, et que tout action implique une responsabilité et une confrontation à une altérité qui ne se plie pas nécessairement à ses désirs. Cet exemple paraît nous instruire sur le fait que la conscience de soi peut rendre l’homme malheureux. Ce constat paraît cependant paradoxal. Si nous définissons en effet la conscience comme con-science, nous devons comprendre la conscience comme le fait d’avoir une connaissance, un savoir, et la conscience de soi comme l’opération par laquelle un homme prend connaissance de lui-même ? Cette connaissance semble alors correspondre à une meilleure capacité à se comprendre, et il n’apparaît pas évident que cette compréhension ait immédiatement pour conséquence un sentiment de douleur et de tristesse, puisque la compréhension est en général plutôt conçue comme un auxiliaire important de la vie et de l’action, permettant à l’homme d’être mieux préparé face aux évènements qui peuvent lui arriver. N’est-il en ce sens pas paradoxal de présenter la connaissance comme un malheur alors même que la connaissance semble distinguer l’homme de l’animal et faire de lui un être plus intelligent et mieux à même d’agir en connaissance de cause ? Nous essaierons ainsi de montrer tout d’abord que la conscience de soi est un atout qui permet à l’homme de viser un bonheur auquel il n’aurait pas accès s’il ne la possédait pas. Néanmoins, nous constaterons ensuite que cette visée du bonheur repose sur des incertitudes et peut entraîner des frustrations qui font que l’homme peut souffrir de cette disjonction entre ce qu’il pense et ce qu’il vit. Nous tenterons alors enfin de dépasser cette opposition entre bonheur et malheur pour montrer que la conscience de soi ne peut rendre l’homme heureux qu’à la condition qu’il refuse de considérer la conscience de soi comme une vérité indubitable. ...
Maiscela serait absurde : nous l'avons dit, la conscience est le fait de se sentir soi-même, dans ce seul temps qui devient ; elle est l'identité actuelle du sentant et du senti, la tautégorie, la sensation de la sensation, cette seule sensation ; s'il y a conscience, actuellement, lors d'un écoulement donné, il ne peut y avoir vraisemblablement que la
[box type= »bio »] Thomas Stéphane Ngameni, Doctorant en Philosophie sous la direction de Mylène Botbol-Baum. Université Catholique de Louvain, UCL, Belgique. Centre de Philosophie Pratique Europé.[/box] [learn_more caption= »Résumé » state= »open »] Cet article se propose d’élucider la nature et les enjeux de la critique acerbe qu’adresse Hans Blumenberg à la thématisation husserlienne de la mise en œuvre de la conscience réflexive dans son rapport aux contenus ou objets intentionnels. Blumenberg dénonce l’aveuglante et trompeuse certitude qui attribue à la conscience de soi la capacité de se prendre elle-même pour objet de sa visée intentionnelle sous le mode d’une immédiateté pure. La charge dirigée contre Husserl signe l’impossibilité pour la conscience de construire d’elle-même ses propres visées intentionnelles, abstraction faite du socle anthropologique qui la constitue. L’alternative proposée par cet héritier critique d’Husserl est alors celle d’un redéploiement ou d’une refonte génétique de la compréhension de la conscience réflexive fondée sur les conditions corporelles et culturelles de son existence.[/learn_more] Introduction [learn_more caption= »Sommaire »] SOMMAIRE Introduction A. Intentionnalité et conscience de soi chez Husserl Conscience et intentionnalité existentielle De l’intentionnalité à la conscience de soi B Conscience de soi husserlienne et apories phénoménologiques L’éviction husserlienne de l’anthropologie en phénoménologie. Conscience de soi et intentionnalité un rapport problématique La conscience de soi un réquisit méthodologique C Une ré-anthropologisation de la conscience de soi Du Zurück zur Sachen » au Zu den Sachen und zurück » Conscience de soi et expérience du corps propre Conclusion Bibliographie[/learn_more] L’œuvre philosophique de Hans Blumenberg est traversée par un dialogue permanent et critique avec Edmund Husserl, l’un des fondateurs de la phénoménologie. En effet, si Blumenberg est perçu comme un héritier critique de la phénoménologie, c’est parce qu’il a su écrire l’histoire des hérésies husserliennes »[1]. Loin de se contenter d’une critique minimaliste d’une phénoménologie husserlienne restée prisonnière d’un certain idéalisme transcendantal, ce philosophe s’est attaqué aux fondements et aux éléments structurels de la pensée d’Husserl. L’un des points saillants de cette critique porte sur les limites de la conception husserlienne de la conscience de soi et sa nécessaire ré-anthropologisation. Cette remise en cause d’un élément clef de la phénoménologie husserlienne n’est pas nouvelle en soi. La question de la conscience est une question complexe dans la phénoménologie de Husserl sur lequel il est d’ailleurs revenu à de nombreuses reprises et qui a été longuement reprise et critiquée par bon nombre de phénoménologues[2]. Cependant, l’originalité de la critique blumenbergienne est qu’elle permet de penser la conscience de soi non plus sous le mode d’une immédiateté interne, d’une réflexivité transparente à ses propres vécus, mais sous celui d’un détour par l’intersubjectivité, par la corporéité. L’objectif de cet article consistera à élucider la nature et les enjeux aussi bien de la critique que de l’alternative anthropologique proposées par Blumenberg. Notre analyse comporte trois moments complémentaires évoquer brièvement l’articulation husserlienne entre conscience de soi et intentionnalité ; dégager les apories de la thématisation husserlienne de la conscience de soi ; montrer que pour Blumenberg la conscience ne peut pas d’elle-même construire ses propres visées intentionnelles, mais a besoin, tel un organisme vivant, de se constituer en se rapportant au monde, à ce qui l’entoure. A Intentionnalité et conscience de soi chez Husserl La problématisation de la conscience de soi chez Husserl nécessite un bref retour à l’une des sources essentielles de la phénoménologie de ce dernier la mise en perspective de l’intentionnalité et son articulation à la conscience de soi en tant que capacité réflexive. Conscience et intentionnalité existentielle Le projet phénoménologique d’E. Husserl s’est nourri d’un idéal fonder une science des sciences, une philosophie libérée de tout préjugé. En effet, quel est le sens fondamental de toute philosophie véritable ? N’est-ce pas de tendre à libérer la philosophie de tout préjugé possible, pour faire d’elle une science vraiment autonome, réalisée en vertu des évidences dernières tirées du sujet lui-même, et trouvant dans ces évidences sa justification absolue ? Cette exigence, que d’aucuns croient exagérée, n’appartient-elle pas à l’essence même de toute philosophie ?[3] Ce désir de faire de la philosophie une science rigoureuse et autonome mènera Husserl du questionnement sur l’origine psychologique des vérités logico-mathématiques à l’analyse du rapport entre la subjectivité du connaître et l’objectivité du contenu de la connaissance. »[4] Husserl en vient à poser, comme caractère distinctif de toutes les opérations de la conscience, par opposition aux phénomènes physiques, leur nécessaire relation à un contenu ou objet intentionnel. L’élément explicatif premier de la conscience est donc l’intentionnalité basée sur une perception externe induisant une perception interne du vécu comme objet mental »[5]. Cette philosophie intentionnelle était déjà présente dans les travaux de F. Brentano, prédécesseur d’Husserl, lequel affirmait le primat de l’expérience, et rapportait tous les phénomènes psychiques à un contenu » ou vers un objet »[6] intentionnel. Brentano et Husserl réactivent ainsi, l’un et l’autre, un certain introspectionnisme moyennant un détour par l’empirisme. Husserl poussera, jusque dans ses ultimes conséquences, cette théorie de l’intentionnalité de la conscience et sa dimension constituante et aboutira à la fameuse formule Toute conscience est conscience de quelque chose »[7]. Théoriquement, la conscience husserlienne n’a pas l’abstraction d’une instance gnoséologique mais l’épaisseur d’une épreuve de soi indexée sur l’expérience du monde. »[8] Des aspects aussi essentiels de la phénoménologie husserlienne tels que la définition de la conscience par l’intentionnalité, la description de la conscience constituante, ont fait école et suscité l’obédience de philosophes tel que Sartre lequel écrivait dans La transcendance de l’ego Nous croyons volontiers pour notre part à l’existence d’une conscience constituante. Nous suivons Husserl dans chacune de ses admirables descriptions où il montre la conscience transcendantale constituant le monde en s’emprisonnant dans la conscience empirique. » [9] Il reste qu’appréhender la conscience à partir de la visée intentionnelle de la conscience et sa dimension constituante, présuppose, chez Husserl, un moment plus originaire, plus fondatif, celui de la conscience permanente de l’acte lui-même. Ici émerge la question de la conscience de soi comme approfondissement de l’intentionnalité première dirigée vers l’objet. De l’intentionnalité à la conscience de soi Brentano soulignait déjà dans ses recherches qu’il existait une liaison particulière entre l’objet de la représentation interne et cette représentation même »[10] au sens où tous les actes de visée intentionnelle s’accompagnaient d’une représentation de soi » c’est-à-dire d’une conscience interne permanente de l’acte lui-même. Il est rejoint en cela par Husserl pour qui tout vécu intentionnel doit devenir lui-même l’objet d’une intention réflexive. Par conséquent, tous les actes descriptifs doivent être soumis au principe de l’intentionnalité. Ainsi que l’affirme Rudolf Bernet, grand spécialiste de la phénoménologie, Toute réflexion sur soi ou toute perception intentionnelle de soi et de ses propres vécus est précédée par une représentation intentionnelle de soi, où ce soi est présenté et pressenti sous la forme d’un objet secondaire. »[11] Pour Husserl, la conscience n’est pas seulement livrée aux objets du monde. Elle ne multiplie ses pôles d’actes intentionnels que pour autant qu’elle est simultanément conscience de soi ou présence à soi. Ce mode d’être de la conscience est une propriété essentielle de celle-ci et une structure nécessaire. La conscience de soi est, d’après Husserl, l’instance supérieure qui fait que je me retrouve moi-même, et le même moi, dans un auto-recouvrement nécessaire. »[12] Elle est le seul mode d’exister qui soit possible pour une conscience de quelque chose »[13] puisqu’elle supervise toute visée intentionnelle de l’objet. Analogie peut être faite ici avec une sorte de synthèse identitaire de soi ou ipséité. Cette conscience de soi coïncide même chez Husserl avec une connaissance de soi Je peux itérativement apprendre à connaître mon Dasein concrètement plein en tant qu’unité egoïque, … et acquérir dans l’action synthétique de l’itération réflexive et dans la conscience originaire du toujours à nouveau » une connaissance de moi-même. »[14] En définitive, c’est concomitamment qu’Husserl articule la dimension existentielle de l’intentionnalité et la conscience de la conscience d’objet. Conscience de soi et conscience positionnelle de l’objet sont ainsi fortement corrélées. Cependant, ce rapport intentionnel de la conscience de soi à l’intentionnalité a été remis en cause par Blumenberg. La conscience de la conscience d’objet, en tant qu’unité totalisée, n’est-elle pas finalement une pure et simple construction spéculative chez Husserl ? S’atteste-t-elle véritablement sous un mode anthropologique ou existentiel ? Satisfait-elle réellement au critère de l’intuition empirique ? B Conscience de soi husserlienne et apories phénoménologiques C’est en se livrant à une véritable exégèse philosophique que Blumenberg décèle, dans la pensée husserlienne, un nombre considérable de contradictions internes, d’apories phénoménologiques. Mais cette remise en cause critique des thèses de l’auteur de la Krisis ne s’effectue qu’au creuset d’un projet philosophique original, celui justement qu’Husserl avait rejeté re-donner à la phénoménologie toute son épaisseur anthropologique. L’éviction husserlienne de l’anthropologie en phénoménologie. La critique blumenbergienne de l’immédiateté de la conscience chez Husserl s’inscrit dans le cadre d’une critique beaucoup plus large la décision de Husserl » et de Heidegger de rejeter l’anthropologie. Blumenberg parle, en effet, et sans ambages, d’un interdit phénoménologique »[15], ou d’une exclusion de l’anthropologie »[16]. S’interrogeant sur les raisons profondes de cette excommunication anthropologique, Blumenberg arrive à l’idée que le rejet de l’anthropologie par Husserl tient de son refus de réduire les vécus de conscience à un dispositif psychique particulier. Pour Husserl, l’anthropologie philosophique est une minimisation philosophique on pourrait dire une sous-estimation la philosophie ne tourne pas à plein régime. Sa présupposition est que la philosophie peut accomplir davantage comme phénoménologie. Elle doit être en mesure de donner une théorie de tout mode possible de conscience et de raison, d’objet et de monde, et même d’intersubjectivité. [17] Pour Husserl, la phénoménologie devrait avoir pour tâche de formuler des vérités valant pour toute conscience humaine. Si ces vérités sont assurées transcendentalement, elles valent pour tout homme. L’objectif visé est donc de s’ajuster à un degré de généralisation qui affranchisse des déterminations particulières de l’expérience mondaine. L’épochè phénoménologique conduirait ainsi à un degré d’analyse dépouillé de toute référence à une anthropologie empirique particulière. On reconnaît ici une manie proprement kantienne de faire reposer la validité des énoncés universelles sur la raison. Ce qui est validé et assuré phénoménologiquement vaut aussi pour l’homme. »[18] Une telle geste phénoménologique donnerait à la conscience l’accès à un royaume d’évidences originelles »[19] dont chacun pourrait éprouver la validité, abstraction faite de toute référence à l’existence du monde »[20] ou à la nature de l’homme. » [21] Ce moment méta » de la constitution transcendantale, où la conscience saisit les phénomènes dépouillés de leur eidos », donnerait, chez Husserl, l’impression d’une nécessité anthropologique au sens où ce dernier l’envisageait lui-même dans ses travaux[22] Ainsi la science universelle est-elle aussi science de l’homme dans sa praxis humaine, mais aussi de l’homme comme connaissant, également de l’homme comme connaissant au sens de l’anthropologie universelle, et ainsi de tous les actes réels et possibles de connaissance, des facultés de connaître, etc. » [23] Si Blumenberg reconnaît l’existence de cette nécessité anthropologique chez Husserl, elle reste cependant pour lui purement théorique et non assumée. Husserl défend le terrain de cette discipline pour la phénoménologie au titre de l’universalité là où il est question de tout, on doit aussi parler de l’homme. L’être du monde serait présupposé, et à ce monde appartient aussi l’homme agissant et connaissant. »[24] Cette invocation non assumée d’un ancrage anthropologique de la phénoménologie apparaît de manière tangible dans la critique acerbe que Blumenberg adresse à Husserl au sujet de l’intentionnalité et la perception immédiate de soi. Ce dernier réinvestit les conditions de possibilités existentielles d’une conscience qui serait purement spectatrice du monde et d’elle-même. Conscience de soi et intentionnalité un rapport problématique L’objection principale que Blumenberg adresse à Husserl porte sur la mise en œuvre effective de la conscience réflexive dans son rapport à la visée intentionnelle de l’objet. Blumenberg problématise l’évidence avec laquelle Husserl décrit la conscience de soi, cette capacité qu’a la conscience de se retourner sur elle, de se prendre elle-même pour objet de sa visée intentionnelle. En effet, pour Husserl et ses disciples, l’idée que la conscience se bouclait sur elle-même constituait un allant de soi ». La transparence du sujet constituant à soi même a toujours relevé d’une certitude épistémique jusqu’à lors peu contestée. Or, pour Blumenberg, cette pseudo évidence repose sur un impensé qui disqualifie la méthode phénoménologique elle-même puisqu’elle se meut intégralement parmi des actes de réflexion. La question fondamentale soulevée par Blumenberg est la suivante Comment la conscience peut-elle avoir conscience d’elle-même et accomplir en même temps des actes à visée intentionnelle ? Est-il possible de rendre compte anthropologiquement de la capacité qu’a la conscience de se mettre à distance des choses pour en faire des objets intentionnels et dans le même temps se saisir comme ce qui résiste à toute variation imaginaire sur ces mêmes objets ? La critique de Blumenberg porte ainsi sur ce pan de la description phénoménologique husserlienne garantissant l’accès de la conscience à ses vécus, ceci sur le mode de l’immédiateté. La conception husserlienne de la conscience comme intentionnalité, c’est-à-dire comme capacité à viser des objets est en parfaite contradiction avec une perception immédiate de soi comme pure conscience de soi. En d’autres termes, la structure essentiellement intentionnelle de la conscience qui la dirige toujours vers un objet ne laisse aucune place à une réflexivité vidée de toute détermination objective. Si l’intentionnalité de la conscience est toujours un se diriger vers » des objets, alors elle devrait, en toute rigueur, exclure toute réflexivité qui viendrait alors interrompre cette disposition fondamentale et sa réalisation. Blumenberg peut donc affirmer en toute logique La réflexion n’appartient pas nécessairement à la conscience. »[25] Nous sommes ainsi placés face à une aporie husserlienne le rapport d’extériorité qui existe entre intentionnalité et réflexivité de la conscience. La réflexivité de la conscience constitue un contrepoint à la thématisation même de l’intentionnalité. En bon phénoménologue, Blumenberg dévoile » l’aveuglante et trompeuse évidence husserlienne sur le rapport d’immédiateté que la conscience a avec elle-même. La question lancinante qui préoccupe alors Blumenberg est de savoir comment sortir de cette aporie phénoménologique. Sa première tentative de réponse réside dans la précision du statut épistémologique de la conscience de soi celui d’être un réquisit méthodologique. La conscience de soi un réquisit méthodologique La conscience de soi relève avant tout chez Blumenberg d’une intuition inférée et non de la connaissance. Le sentiment d’une saisie immédiate de soi est celui d’un renfermement sur soi, d’une boucle. C’est le sentiment de fusion, dans l’unicité de la personne, d’un sujet réfléchissant et d’un sujet réfléchi, sujets qui sont tout à la fois identiques et distincts. Ce dont on s’approprie dans le retour de la conscience sur elle-même, ce n’est pas d’abord un savoir, mais la perception de cette unité substantielle au plus intime de l’être entre un je » constituant et un je » constitué. Ce à quoi l’on s’exerce et ce que l’on s’approprie n’est pas la réflexion en tant que telle … mais sa concentration sur le domaine d’origine hétérogène, à savoir transcendantal, de la conscience, là où elle se produit elle-même. »[26] Le recours à l’idée d’une conscience pure n’est finalement qu’un réquisit méthodologique et non une vérité anthropologique. Méthodologiquement, le sujet se saisit virtuellement » dans une spontanéité antérieure à l’intentionnalité de sa conscience. Le renfermement de la conscience sur elle-même ne résorbe donc pas la distance entre un sujet connaissant et un sujet connu, entre un ego transcendantal et un ego mondain. L’auto-dévoilement du sujet plonge ainsi l’identité de ce dernier dans une totale incertitude en raison de la situation plurielle de l’ego constituant dans le monde, y compris dans le monde biologique. C’est ici qu’entre en ligne de compte la dimension proprement anthropologique de la conscience réflexive chez Blumenberg. La conscience ne se rapporte réflexivement à elle-même autrement que par le biais de variations imaginaires et plurielles dont le socle est anthropologique. Si, pour Husserl, les hypothèses eidétiques se fondent sur l’évidence d’un monde qui existe, pour Blumenberg, les hypothèses phénoménologiques, elles, reposent sur un fondement anthropologique. C Une ré-anthropologisation de la conscience de soi Du Zurück zur Sachen » au Zu den Sachen und zurück »[27] Le mot d’ordre husserlien d’un retour aux choses mêmes » telles qu’elles se présentent à une conscience objective susceptible de les décrire ne convainc pas, avons-nous vu. Blumenberg y perçoit les relents d’un pseudo-réalisme dont il convient de questionner les présupposés phénoménologiques. Ce dont il faudrait revenir, selon notre philosophe, c’est de la prétention prométhéenne de définir transcendentalement l’essence des choses elles-mêmes car, dans l’élaboration de sa science rigoureuse, Husserl aurait oublié que le je » qui s’interroge, est un je » qui affirme son inscription dans un corps, dans un monde. Blumenberg émet ainsi l’idée d’une anthropologisation et même d’une biologisation de la conscience. Telle est d’ailleurs la thèse centrale qui traverse son ouvrage Zu den Sachen und zurück Ma thèse est la suivante l’intentionnalité, comme la déterminabilité de la conscience qui lui ménage sa capacité à avoir des objets, peut être fondée de façon suffisante sur un fondement anthropologique. »[28] Il s’agit de se départir d’une compréhension de la conscience qui en donne une définition définitive entendue comme totalement séparée du bios, de l’animalité. La saisie immédiate de soi doit être rapportée aux conditions de possibilité complexes de la conscience humaine. Ainsi que l’affirme Blumenberg, la conscience de soi est un factum »[29] anthropologique et biologique Pour une interprétation strictement biologique, l’homme ne fut pas, en un premier temps, une tentative très réussie de la nature. Manifestement, les premières formes de compensation de l’adaptation réduite du système organique – c’est-à-dire les premières ébauches de ce que nous appelons culture – n’étaient pas très performantes. … tout indique la pénibilité avec laquelle se sont constituées et agrégées les réalisations que nous avons appris à considérer rétrospectivement, comme la trace de la raison. La raison et la culture, quoi qu’elles aient encore pu être ou devenir par ailleurs sont tout d’abord les corrélats d’une problématique existentielle intensifiée. [30] Cette réhabilitation d’une anthropologie existentielle et phénoménologique de la conscience de soi suppose un rejet de la détermination aristotélicienne de l’homme comme animal rationnel ». Blumenberg affirme en effet qu’ il y a un grand nombre de théories qui ont été formées sur la communication d’êtres rationnels sous la stricte supposition de la minimisation de leurs mondes d’expérience et de leurs moyens de compréhension. »[31] De telles théories oblitèrent d’autres types de rapports, entre autres le lien substantiel entre la conscience et la corporéité. Cette définition qui superpose la raison à l’organisme empêche de voir le lien essentiel qui existe entre la structure de la conscience et ce que nous appelons culture », de ce qui est à la fois naturel et culturel. Avant d’être raison, l’humanité est corporéité. »[32] Cette ré-anthropologisation de la conscience de soi chez Blumenberg ne signifie pas un retour pur et simple à une anthropologie substantialiste traditionnelle, mais plutôt une prise en compte des possibilités infinies de projection de soi. L’indéfinissabilité, nous dit Blumenberg, est l’essence de l’homme. »[33] Conscience de soi et expérience du corps propre L’un des axes principaux des réflexions de Blumenberg sur le rapport entre la conscience de soi et l’anthropologie réside dans la visibilité du corps propre au sens où La transcendantalisation de l’intersubjectivité et la visibilité anthropologique du corps pourraient converger, fût-ce, contre la volonté du premier des phénoménologues. »[34] Cette visibilité du corps ne relève pas simplement du constat massif que l’homme a un corps » et est ainsi physiquement visible ». Elle signifie plus fondamentalement qu’ il est déterminé et traversé en permanence par le pouvoir-voir de l’autre. »[35] Ce pouvoir-voir de l’autre » soumet le sujet à un complexe anthropologique de la visibilité »[36] se rapportant à la nudité même du corps et se traduisant culturellement par des mécanismes de voilement pudeur ou de dévoilement érotisation du corps. Cette médiation et cette variété culturelles rompent toute relation d’immédiateté de la conscience de soi à l’expérience du corps propre. On comprend dès lors pourquoi Blumenberg met en avant le concept de distance » pour montrer que l’une des caractéristiques essentielles de l’être humain consiste dans le renoncement à l’immédiateté »[37]. Ce renoncement est rendu manifeste dans la création par l’homme d’une zone culturelle » d’outils et d’institutions autour de son corps nu »[38], par la domestication indirecte de soi. L’homme est finalement ce parasite sui generis » qui déconstruit le contact immédiat avec la réalité et les réalisations propres qui s’y rapportent. »[39] Le redéploiement de la compréhension de la conscience de soi chez Blumenberg requiert ainsi que l’on s’attache à la facticité du corps propre et aux conditions culturelles et extracorporelles de son existence. Ici apparaît aussi l’importance que Blumenberg accorde à la métaphore en tant que médium de l’expression de soi révélant en creux l’incapacité fondamentale de la conscience de soi à s’abstraire des expériences mondaines de l’ego transcendantal. Conclusion Pour Blumenberg la conscience de soi, comme saisie des faits dans leur pureté est une fiction husserlienne. Une codification homogène de la conscience, en tant qu’elle est capable de s’élever à sa forme pure, de demeurer une structure inchangée par-delà les ajouts et les retraits qu’elle subirait, mène, de facto à une aporie. Blumenberg propose une refonte génétique de cette conscience de soi en prenant en compte l’opacité de soi et la contingence même de la nature humaine. Si la conscience de soi permet au sujet de coïncider avec lui-même, c’est dans l’interstice des potentialités qu’elle a d’être attentive, d’être distraite et même d’oublier. C’est donc au travers de ses déterminations proprement humaines, des ressources de sa survie que la conscience peut réaliser ses opérations et construire son identité. Cette capacité à se rapporter à soi, à l’autre, au monde, constitue, selon Blumenberg, l’une des qualités les plus surprenantes de la conscience car elle en fait une actrice, une instance capable de jouer la comédie »[40]. BIBLIOGRAPHIE Brentano F., Psychologie du point de vue empirique, Paris, Vrin, 2008. Bernet R., La vie du sujet. Recherches sur l’interprétation de Husserl dans la phénoménologie, Paris, PUF, 1994. Blumenberg H., Description de l’homme, traduit par Denis Trierweiler, Paris, Cerf, 2011. De Coorebyter V., Sartre face à la phénoménologie. Autour de L’intentionnalité » et de La transcendance de l’ego », Paris, Editions Ousia, 2000. Depraz N., Sur l’intersubjectivité, t. 2, Paris, Broché, 2011. Husserl E., Méditations cartésiennes. Introduction à la phénoménologie, Paris, Broché, 2000. Husserl E., Idées directrices pour une phénoménologie et une philosophie phénoménologique pures, livre premier. Introduction générale à la phénoménologie pure, trad. de l’allemand par P. Ricœur, Paris, Gallimard, 1950. Husserl E., La réduction phénoménologique. textes posthumes 1926-1935, Grenoble, Jérôme Millon, 2007. Husserl E., Recherches Logiques. Tome II. Recherches pour la phénoménologie et la théorie de la connaissance. 2ème partie Recherches III, IV et V, traduit de l’allemand par Hubert Elie, Arion L. Kelkel et René Schérer, Paris, PUF, 1993. Husserl E., Recherches Logiques. Tome III. Recherches pour la phénoménologie et la théorie de la connaissance. 2ème partie Recherche VI, traduit de l’allemand par Hubert Elie, Arion L. Kelkel et René Schérer, Paris, PUF, 1993. Merleau-Ponty M., La nature. Notes. Cours du collège de France, Paris, Seuil, 1995, p. 269. Monod L’interdit anthropologique » chez Husserl et Heidegger et sa transgression par Blumenberg, Revue germanique internationale », n° 10, 2009, pp. 221-236. Ricœur P., À l’école de la phénoménologie, Paris, Broché, 1998. Sartre L’être et le néant. Essai d’ontologie phénoménologique, Paris, Gallimard, 1984. Sartre La transcendance de l’ego, Paris Vrin, 2003. [1] P. Ricœur, À l’école de la phénoménologie, Paris, Broché, 1998, p. 156. [2] On pourrait par exemple se référer à l’article de Serban Claudia, Conscience impressionnelle et conscience réflexive Husserl, Fink et les critiques phénoménologiques », Revue philosophique de la France et de l’étranger, 2012/4, t. 137, pp. 473-493. [3] E. Husserl, Méditations cartésiennes. Introduction à la phénoménologie, Paris, Broché, 2000, p. 5. [4] E. Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie et une philosophie phénoménologique pures, livre premier. Introduction générale à la phénoménologie pure, trad. de l’allemand par P. Ricœur, Paris, Gallimard, 1950, p. VII. [5] E. Husserl, Recherches Logiques. Tome II. Recherches pour la phénoménologie et la théorie de la connaissance. 2ème partie Recherches III, IV et V, traduit de l’allemand par Hubert Elie, Arion L. Kelkel et René Schérer, Paris, PUF, 1993, p. 153. [6] F. Brentano, Psychologie du point de vue empirique, Paris, Vrin, 2008, p. 101. [7] H. Blumenberg, Description de l’homme, traduit par Denis Trierweiler, Paris, Cerf, 2011, p. 237. [8] V. de Coorebyter, Sartre face à la phénoménologie. Autour de L’intentionnalité » et de La transcendance de l’ego », Paris, Editions Ousia, 2000, p. 333. [9] Sartre, La transcendance de l’ego, Paris Vrin, 2003, p. 18. [10] F. Brentano, p. 139. [11] R. Bernet, La vie du sujet. Recherches sur l’interprétation de Husserl dans la phénoménologie, Paris, PUF, 1994, p. 319. [12] E. Husserl, Recherches Logiques. Tome III. Recherches pour la phénoménologie et la théorie de la connaissance. 2ème partie Recherche VI, traduit de l’allemand par Hubert Elie, Arion L. Kelkel et René Schérer, Paris, PUF, 1993, p. 411. [13] Sartre, L’être et le néant. Essai d’ontologie phénoménologique, Paris, Gallimard, 1984, p. 20. [14] E. Husserl, La réduction phénoménologique. textes posthumes 1926-1935, Grenoble, Jérôme Millon, 2007, p. 186. [15] H. Blumenberg, p. 154. [16] Idem. [17] Ibid., p. 30. [18] Ibid., p. 31. [19] Monod, L’interdit anthropologique » chez Husserl et Heidegger et sa transgression par Blumenberg », Revue germanique internationale, n° 10, 2009, p. 223. [20] Idem. [21] Idem. [22] Dans ses derniers travaux sur l’intersubjectivité Cf. Husserliana, XIII, XIV et XV, Husserl multiplie l’usage du mot anthropologie » mais sans lui donner sa consistance propre. [23] E. Husserl, Husserliana, tome XV, La Haye, Martinus Nijhoff, 1950, p. 480 cité par N. Depraz, Sur l’intersubjectivité, t. 2, Paris, Broché, 2011, p. 374. [24] H. Blumenberg, p. 437. [25] Ibid., p. 154. [26] Ibid., p. 258. [27] Du retour aux choses », mot d’ordre de la phénoménologie, au retour des choses mêmes » au sens de revenir des choses mêmes ou plus littéralement Aux choses mêmes et retour » selon le titre d’un ouvrage de Blumenberg intitulé Zu den Sachen und zurück . [28] H. Blumenberg, Zu den Sachen und zurück, Francfort/Main, 2002, p. 132 cité par Monod, L’interdit anthropologique » chez Husserl et Heidegger et sa transgression par Blumenberg », Revue germanique internationale, n° 10, 2009, p. 225. [29] H. Blumenberg, p. 39 et p. 242. [30] Ibid., p. 488-489. [31] Ibid., p. 489. [32] M. Merleau-Ponty, La nature. Notes. Cours du collège de France, Paris, Seuil, 1995, p. 269. [33] H. Blumenberg, p. 510. [34] La transcendantalisation de l’intersubjectivité et la visibilité anthropologique pourraient converger …, fût-ce contre la volonté du premier des phénoménologues. » H. Blumenberg, p. 237. [35] Monod, op. cit., p. 234. [36] Idem. [37] H. Blumenberg, p. 556. [38] Ibid., p. 503. [39] Ibid., p. 549. [40] Ibid., p. 146.
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la conscience de soi est elle trompeuse